Point de vue

Marcel Proust  
Un point de vue personnel  
de
Paul Dubé  
(et Copernique Marshall)


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Les préfaciers de Proust

Note (de l'éditeur)

Le texte qui suit est celui qui est paru lors de la version précédente de ce que Paul Dubé a renommé «Un point de vue personnel [sur Proust]» et que les auteurs (Paul et notre autre chroniqueur, Copernique Marshall) avaient tout simplement intitulé «Études», «Notes et commentaires» ou «Chroniques [sur Proust]» dans la diffusion que nous en avons faite à l'époque.

«Pour que le tout soit une suite à la causerie» a-t-il.

Nous n'avons eu aucune objection sauf que dans son ensemble, il y a une chose qui ne retrouve pas et qui faisait partie de sa première version : celle de comment les deux en sont venus à rédiger leurs Études, Notes et commentaires et Chroniques.

C'est ce que nous avons tenu à ajouter ici.

Sous son titre originel.

La rédaction


Les préfaciers de Proust

Introduction

Aussi peu plausible que cela puisse paraître, ni l'un ni l'autre des rédacteurs de cette série de mini-essais sur À la recherche du Temps perdu attachent une importance aux notes et introductions et préfaces qui précèdent ou accompagnent les  livres qui les intéressent, qu'ils feuillettent chez leurs libraires, ou qu'ils ont éventuellement l'intention de lire. Ils en lisent les résumés - à condition que ces résumés soient courts -  prennent note du contenu de leurs faire-valoir et ce que la presse dit de son auteur, mais jamais plus. 

Une fois qu'ils ont lus ces livres, ils se permettent cependant de dévorer de longues études à leur sujet surtout rédigées par des critiques ou des écrivains à qui ils font confiance ou encore par des spécialistes susceptibles de les éclairer sur certains points tels que : la façon dont ils ont été écrits, leur organisation générale, l'impact qu'ils ont eus sur la littérature ou l'histoire et, dans le cas, d'oeuvres majeures, s'ils ont eu une suite. 

Proust, en ce sens, à cause de sa notoriété et des conditions dans lesquels sa Recherche fut publiée, s'est avéré un cas majeur de post-lectures. 

Pour rédiger nos chroniques (et d'autres à venir), par exemple, ils - c'est à dire nous - avons revu, lu et comparé nos notes sur pas moins de 29 préfaces, introductions, commentaires sur À la recherche du temps perdu ; des tous premiers textes de Léon Pierre-Quint (1925) aux plus ou moins dernières notes et préfaces publiés dans le cadre de sa plus récente traduction en anglais, traduction préparée, annotée et éditée sous la direction de Christopher Prendergast (2002). - Au total, ces 29 préfaces étaient composées de plus de 400,000 mots ou 800 pages allant d'une simple note à près de 100 pages pour deux d'entre elles.

Voici la liste de ces vingt-neuf préfaces auxquelles nous pourrions ajouter une postface de Volker Schlöndorff parue dans une édition d'Un amour de Swann en marge du film qu'il en a tiré en 1984 avec, en vedettes, Jeremy Iron, Ornella Muti, Alain Delon, etc. (chez Gallimard, la même année), mais cette postface est plus en rapport avec l'art cinématographique que la littérature proustienne :

- Léon Pierre Quint - Marcel Proust, sa vie, son oeuvre - 1925
  (Le texte de cette préface est reproduit en notre annexe 5.)

- Léon Pierre Quint - Marcel Proust, sa vie, son oeuvre - 1928
  (Le texte de cette préface est reproduit en notre annexe 6.)

- Léon Pierre Quint - Marcel Proust, sa vie, son oeuvre - 1936
  (Le texte de cette préface est reproduit en notre annexe 7.)

- Joseph Wood Krutch - Introduction to Moncrieff's translation - 1934  (Le texte de cette préface [en anglais] est reproduit en notre annexe 12.)

- André Maurois - Préface à l'édition de La Pléiade d'À la recherche du Temps perdu (Pierre Clarac et André Ferré) - 1954 (Le texte de cette préface est reproduit en notre annexe 2.)

- Pierre Clarac et André Ferré - Note sur le texte de l'édition de La Pléiade d'À la recherche du Temps perdu - 1954 

- Pierre Clarac et André Ferré - Note sur le texte de La prisonnière - idem

- Pierre Clarac et André Ferré - Note sur le texte de La fugitive - idem

- Pierre Clarac et André Ferré - Note sur le texte du Temps retrouvé - idem

(Le texte de la première de ces notes est reproduit en notre annexe 3.)

- Terence Kilmartin - Note on the revised translation of Remembrance of Things Past (based on the 1954 Pléiade Edition and the original translations of Scott Moncrieff, Stephen Hudson and Andreas Mayor) - 1981

- Jean Milly - Edition du texte et introduction à La prisonnière - GF Flammarion, 1984

- Bernard Brun - Edition du texte, introduction et bibliographie du Temps retrouvé - GF Flammarion, 1986

 - Jean Milly - Edition du texte, introduction, bibliographie et chronologie de La fugitive (Albertine disparue) - GF Flammarion, 1986

- Nathalie Mauriac et Etienne Wolff - Albertine disparue - Edition originale de la dernière version revues par l'auteur - Grasset, 1987

- Danièle Casiglia-Laster - Edition du texte, notes, bibliographie d'A l'ombre des jeunes filles en fleurs - GF Flammarion, 1987

- Yves Tadié - Introduction générale à A la recherche du Temps perdu, La Pléiade, 1987

- Bernard Raffali - Introduction générale à A la recherche du Temps perdu, Bouquins, 1987

- Anne Chevalier - Préface à Albertine disparue - Folio, 1992

- Bernard Brun  - Préface à Du côté des Guermantes, tome I et II, Livre de poche, 1992

- P. E. Robert - Préface à La prisonnière - Folio, 1992

- Françoise Leriche - Édition établie, présentée et annotée de Sodome et Gomorrhe I et II - Livre de poche, 1993

- Christopher Prendergast's New Penguin Edition of Remembrance of Things past, 2002 :

- Christopher Prendergast - General Introduction

- Lydia Davis : The Way by Swann's

- James Grieve : In the shadow of young Girls in Flower

- Mark Treharne : The Guermantes Way

- John Sturrock : Sodom and Gomorrah

- Carol Clark : The prisoner

- Peter Collier The Fugitive

 - Ian Patterson : Finding Time Again

*** 

   Préface ?

Selon la plupart des dictionnaires, une préface serait un «avant-propos, un discours préliminaire que l'on met à la tête d'un livre pour avertir le lecteur de ce qui regarde l'ouvrage». Plus précisément, les buts d'une préface serait «de présenter un ouvrage et en recommander la lecture».

Des textes que nous avons lus, six ou sept pourraient être considérés comme répondant exactement à ces définitions, mais il nous faut souligner qu'étant donné la particularité d'À la recherche (et de l'historique de ses éditions) il nous a semblé important de lire : 1) comment son texte a été reconstitué à partir des textes que Proust a pu revoir avant sa mort et des manuscrits qu'il a laissés derrière lui et 2) les approches qu'ont adoptées ses différents traducteurs (anglais ou américains) pour les raisons que nous avons mentionnées ici et là.

Dans l'ensemble, nous avons trouvé beaucoup trop, à notre avis, de textes pro domo c'est-à-dire des «préfaces» dont le sujet était presque accessoirement Proust, les auteurs ayant chercher à démontrer plus leur talent de lecteur, leur connaissance littéraire ou leur intelligence plutôt que d'expliquer ce pourquoi À la recherche valait la peine d'être lu. D'autre part, certaines «introductions» n'étaient qu'un résumé du texte de Proust, résumé consistant en la description de sa partie narrative et de longs exposés sur ses personnages au point où nous connaissons tous des lecteurs qui pourraient ne plus être intéressés à le lire compte tenu qu'ils ont appris, après la lecture de ces introductions, le fond, la forme et même les histoires qu'on y raconte.

Côté traduction, trois seulement des préfaces, notes et introductions que nous avons lus ont eu pour objet la difficulté de traduire Proust et les moyens qu'ils ont utilisés pour en donner une version le plus près possible de la phrase proustienne qui, nous l'avons déjà dit, fait partie intégrante de l'oeuvre. Nous avons trouvé dans les autres les mêmes qualités ou défauts soulignés en rapport avec les textes mentionnés dans le paragraphe précédent.

   Nos choix :

Pour le texte, pour une véritable introduction à La recherche, André Maurois - Préface à l'édition de La Pléiade par Pierre Clarac et André Ferré - 1954. (Le texte complet de cette introduction se trouvera en l'annexe 2 ci-jointe.)

Sur les difficultés à réunir et éditer À la recherche, Pierre Clarac et André Ferré, Note sur le texte de l'édition de La Pléiade d'À la recherche du Temps perdu - 1954 (Annexe 3)

Sur les différentes traductions pré-Prendergast, Terence Kilmartin - Note on the revised translation of Remembrance of Things Past (based on the 1954 Pléiade Edition and the original translations of Scott Moncrieff, Stephen Hudson and Andreas Mayor) - 1981. - Voir ci-dessous.

Sur les problèmes concernant la traduction d'À la recherche et des choix qu'il faut faire, Lydia Davis : The Way by Swann's - 2002.

Quant aux inévitables polémiques qui découlent des décisions prises lors de l'édition d'un volume en particulier, Nathalie Mauriac et Etienne Wolff - Albertine disparue - Edition originale de la dernière version revues par l'auteur - Grasset, 1987 que l'on comparera au texte d'Anne Chevalier - Préface à Albertine disparue - Folio, 1992.

***

À noter :

Voici deux extraits tirés de la traduction d'À la recherche du Temps perdu de Scott Moncrieff par celui qui en a révisé l'édition de 1981 (contenant les ajouts et les corrections de  Stephen Hudson et Andreas Mayor), Terence Kilmartin (Note on the revised translation of Remembrance of Things Past ) :

«A general criticism that might be levelled against Scott Moncrieff is that his prose tends to the purple and the precious - or that this is how he interpreted the tone of the original: whereas the truth is that, complicated, dense, overloaded though it often is, Proust's style is essentially natural and unaffected, quite free of preciosity, archaism or self-conscious elegance.»

Traduction :

«Une critique générale qui pourrait être dirigée contre Scott Moncrieff est que sa prose tend vers le pourpre et le précieux - ou que c'est ainsi qu'il interprète le ton de l'original alors que la vérité est que :  aussi compliqué, dense et surchargé que puisse être souvent le style de Proust, il est essentiellement naturel et sans fioritures, dépourvu de préciosité, d'archaïsme ou d'élégance manifeste.»

«Another pervasive weakness of Scott Moncrieff's is perhaps the defect of a virtue. Contrary to a widely-held view, he stuck very closely to the original (he is seldom guilty of short-cuts, omissions or loose paraphrases), and in his efforts to reproduce the structure of those elaborate sentences with their spiralling subordinate clauses, not only does he sometimes lose the thread but he wrenches his syntax into oddly unEnglish shapes: a whiff of Gallicism clings to some of the longer periods, obscuring the sense and falsifying the tone.»

Traduction :

«Une autre faiblesse omniprésente de Scott Moncrieff est peut-être le défaut d'une vertu. Contrairement à un point de vue largement répandu, il reste très proche de l'original (il est rarement coupable de raccourcis, d'omissions ou de paraphrases), et dans ses efforts pour reproduire la structure de ces phrases élaborées avec leurs clauses subalternes en spirale, il en perd très peu le fil, mais il arbore sa syntaxe dans des formes étrangement non anglaises: un soupçon de gaulisme s'accroche à certaines des plus longues périodes, obscurcissant le sens et faussant le ton.»

«A corollary to this is a tendency to translate French idioms and turns of phrase literally, thus making them sound weirder, more outlandish, than they would to a French reader. In endeavouring to rectify these weaknesses, I hope I have preserved the undoubted felicity of much of Scott Moncrieff while doing the fullest possible justice to Proust.»

Traduction :

«Un corollaire à cela est une tendance à traduire littéralement les idiomes français et les tournures de phrase, les rendant ainsi plus étranges, plus bizarres qu'ils ne le feraient pour un lecteur français. En essayant de remédier à ces faiblesses, j'espère avoir préservé la félicité indubitable d'une grande partie de Scott Moncrieff tout en rendant justice à Proust le plus complètement possible.»

Sur ces remarques, il est difficile de ne pas être d'accord, mais nous sommes d'avis que la traduction originelle de Moncrieff demeure en elle-même une remarquable réussite en ayant reproduit [sans fioritures, préciosité et archaïsmes...] l'atmosphère qui se dégage de l'ensemble du texte de Proust une fois qu'on en lu la totalité. C'est pourquoi il est difficile, comme divers critiques que nous soupçonnons posséder une connaissance approfondie et du français, et de l'anglais, de ne pas la qualifier de chef-d'oeuvre à part entière.


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