Vol. XXX,  n° 12 Le seul hebdomadaire de la région publié une fois par mois Le lundi 3 août 2020

Août

La plage Roger... Idéal... Alouette... Monjoie... 
Claude et Armande... l'Île au trésor...

...
Les filles de Rosemont en bikini
(La naissance de la tragédie)

(Lucien Francoeur : Blue jeans sur la plage)


 

Ce numéro :  

Shaye Cohn, Antoine Paul, Anton Tchekov, Sam Harris, Julien Green, Henriette Dessaulles, Haendel, Leconte de Lisle et Sully Prud'homme (sans oublier François Coppée et José-Maria de Heredia), John Dickson Carr, Richard Feynman, Danielle Darrieux, Nat King Cole, Proust (Marcel), Marceline Desbordes-Valmore, Arthur Conan Doyle (Sherlock Holmes), Edna St.Vincent Millay, Marguerite Yourcenar et Virgina Woolf, Charles Trenet, Leonidas Josaphat Léon Pérec, Démence et Alzheimer, Trump et John Lewis.

Bonne Lecture !

Chroniques  

Les chroniques précédentes de nos correspondants peuvent être consultées sur CE LIEN.

À noter :

Que ces chroniques sont, comme tout le site de l'Université de Napierville, en révision. Plus particulièrement, toutes les chroniques et les écrits hors-texte de nos correspondants sont à être reclassés chronologiquement, la présentation modifiée (fontes, espacement, liens, etc.) de même que les photos qui sont individuellement restaurées.

Une attention particulière sera éventuellement donnée aux fautes de frappe, erreurs dans la transcription, les dates et autres incongruités dans l'édition de ces chroniques destinée au marché américain.

    Simon Popp

Moi, professeur de littérature ?

Il m'arrive souvent de penser que si le hasard m'avait désigné l'affligeante tâche d'enseigner la littérature à des adolescents dont les lectures se limitent à des bandes dessinées, des romans de moins de cent pages (exclusion faite pour les Harry Potter) ou des livres sérieux, mais en abrégés, un des premiers travaux que j'aurais exigé d'eux, aurait été de trouver le plus mauvais poème écrit au XIXe siècle, mais un poème toujours disponible aujourd'hui en librairie, ou dans la bibliothèque de leur quartier.

(Je vois d'ici la gueule des libraires et des bibliothécaires qui verraient ces jeunes entrer dans leurs établissements à la recherche de ils-n'ont-aucune-idée-de-quoi !)

À la rigueur, j'aurais pu, pour leur éviter des recherches inutiles, leur citer quelques noms de poètes parmi lesquels je n'aurais pas oublié ceux de : Leconte de Lisle, José-Maria Hérédia, François Coppée et Sully Prud'homme (en insistant, pour ce dernier, sur le fait qu'il fut le premier récipiendaire du Prix Nobel de Littérature). Mais je n'aurais eu aucune objection à ce qu'il me cite Châteaubriand, Lamartine ou même Victor Hugo.

Sully Prud'homme
(1839-1907)

Naturellement, une fois que chacun d'entre-eux aurait trouvé son poème, il (*) lui aurait fallu écrire quelque mots, mettons une centaine, pourquoi il aurait choisi le sien. 

(*) Vous savez que j'en ai jusque là de me faire reprendre quand je dis «ils» à propos des ouvriers et des ouvrières, des pharmaciens et des pharmaciennes, des caissiers et des caissières, des musiciens et des musiciennes (quoique je cherche toujours le féminin de «hôte» dans le sens de celle qui est reçue et non qui reçoit où existe déjà le mot «hôtesse»). Quand je dis ou écris «ils», il me semble évident, selon le contexte, que j'exprime bien l'idée à la fois de «ceux» et de «celles» dont auxquels je fais référence à, selon un usage bien établi. Les féministes (hommes et femmes) qui insistent que j'ajoute un «e» à professeur,  docteur, possesseur, auteur...  et que je mentionne implicitement les deux sexes quand je dis «ils», me trouveront moins drôles quand je parlerai des «voleurs et des voleuses», des «criminels et des criminelles», «des assassins» et des «assassines» ou des «violeurs et des violeuses» (de petits et de petites en bas âge). Mais en passant, est-ce qu'ils ou elles pourraient me dire s'il y a un masculin pour une dinde ? Car j'en connais quelques unes. Mais pas un et si j'en connaisses un, il ne me viendrait pas à l'idée de l'appeler «dindon».

L'idée serait de forcer mes élèves à lire des poèmes et non plus répéter continuellement des bouts de chansons géniales - pardon : écoeurantes. et, qui sait, dans le lot, peut-être qu'il y en aura quelques uns (unes - voir ci-dessus) qui, éventuellement, aura l'idée d'écrire un second «À la recherche du Temps perdu» ou... pourquoi pas ? Un «À la recherche d'un Futur perdu», comme dans une des dernières chansons de Trenet :

Il y a des jours où les jeunes qui s'ennuient
Peuvent tout casser au nom de vérités
Dont la meilleure est sans doute leur vie
Dans un destin qu'ils n'ont pas mérité.

(Banlieue de banlieue - 1999)

*

À consulter :
(Si jamais il vous arrive de vous demander ce que le Gouvernement fait avec votre argent)

Un documents du Ministère des Travaux Publics et Services gouvernementaux Canada, section traduction, sur la féminisation des textes (chapitre neuf) :

https://www.btb.termiumplus.gc.ca/redac-chap?lang=fra&lettr=chapsect9&info0=9

*

 Et puis, vous direz ce que voudrez, mais...

Dans ce secteur de la planète que l'on appelle l'Amérique du Nord où la nature semble avoir décidé d'implanter ça et là ses meilleurs atouts, y compris celui de l'abondance, là où deux types de démocratie sont, juridiquement parlant, les seules formes acceptables de gouvernement et où tous les citoyens ont droit de parole, y'a des gens à qui il devrait être interdit non seulement de parler, mais de penser Je parle de ceux - et vous en connaissez, ce qui vous exclue automatiquement - dont l'intelligence dépasse à peine celle d'une deuxième couche de peinture.

Bout de bon dieu, ce qu'il peut y avoir des cons, des couillons des crétins, des andouilles, des idiots et de stupides imbéciles dans la vie ! Ça dépasse l'imagination !

Entendez-moi bien : je ne parle pas des simples d'esprit, de ceux à qui la toujours nature a décidé de donner un quotient intellectuel digne d'un code postal d'un village où il y a six maisons et deux étables. - Non. - Ceux-là sont dans une classe à part et méritent toute notre pitié.

Je parle de ceux qui il manque une bière à leurs six-pack, quelques cartes dans leurs jeux, des rames à leur chaloupe. Ceux qui ont des chauves-souris dans leur beffroi. Et si vous n'en connaissez pas, y'a des bonnes chances que vous en êtes selon le principe que, dans tous les groupes, il y a un ou une qui est le moins ou la moins intelligente et si vous ne pouvez pas l'identifier, c'est que c'est vous.

Vous en voulez une liste ? Voici quelques exemples de personnes qui mériteraient d'être frappées de plein fouet par un chauffeur en état d'ébriété au volant d'un dix roues ou d'être installées sur des chaises électriques chez leurs coiffeurs ou à qui, fervents catholiques, on devrait refuser les derniers sacrements :

Ceux qui ont des opinions sur tout et qui n'ont aucune idée de quoi ils parlent. Ceux qui, demain matin, se disent prêts à diriger la Province, un Pays, la Planète. Pour les reconnaître, il suffit de leur poser une question, généralement simple, mais qui demande quand même un peu connaissance, genre : «Comme calcule-t-on le PNB d'une nation ?» Ou tout simplement ; «Qu'est-ce que  le PNB ?» Ou si, comme l'affirmait un des crétins notoires présentement (Donald Trump) :  «Un  BNP peut-il être négatif ?».

Les membres des club Optimistes, Kiwanis, Lions, Moose, etc. qui jugent la qualité de leur club par le prix qu'on y charge pour le spaghetti du vendredi. (Généralement en dessous de celui du pire restaurant de la région où ils vivent. Mais où le pain est gratuit, et à volonté , le tout accompagné d'un dessert : du Jell-O ou du blanc-mange,. - Danse sans contact les samedis.)

Toutes celles (car je pense aux belle-mères en disant ce qui suit car ce serait très rare chez un beau-père...) qui débutent leurs phrases par : «Ce n'est pas que je veux me mêler de vos affaires., mais...» 

Et y'a ceux qui disent : «Dans mon temps...» - Dans votre temps, bandes de couillons, vous faisiez la queue à la banque pour déposer votre chèque de paie ou retirer de l'argent face à un commis qui ne parlait que l'anglais. Aujourd'hui, les gens civilisés ont des cartes guichet émis par la Caisse Populaire et ne veulent rien savoir d'un commis unilingue, même français, qui gagne moins qu'eux.

Ceux qui ont un appareil main-libre pour répondre à leur téléphone et qui discutent de projets de milliers de dollars au restaurant. Comme s'il voulait être en contact permanent avec Trudeau au cas où il aurait de besoin de leur aide (avec le Président de la France sur la deuxième ligne).

Les amateurs de musique Punk, Hard Rock, Hip Hop, Rap qui, aux feux rouges, tiennent absolument à ce que vous entendiez leur dernière découverte sur leur système deux mille huit cent watts avec bass booster... Sans oubliez les amateurs de New Wave qui sont convaincus qu'un «carillon éolien» (wind chimes) est un instrument de musique.

Ceux... ceux qui... ceux :

  • au super-marché bloquent les allées parce qu'il doivent lire tous ingrédients contenus dans les aliments qu'ils vont peut-être acheter
  • à la SAQ demandent l'aide d'un assistant de vingt ans sur la sorte de vin qu'ils devraient acheter pour manger avec le steak d'orignal que leur beauf' a abattu dans la région entre Senneterre et l'Île d'Anticosti...
  • attendent d'ouvrir leur sac à dos qui contient leur sac à main qui contient leur porte-feuille qui contient leur porte-monnaie pour payer le 8,34$ de leur achat...
  • chauffeurs de taxi, écoutent de la musique iranienne à tue-tête sur leur radio
  • demandent la différence entre une clé USG de 16 gigs et une de 64 gigs chez Bureau en Gros
  • ...

Paul a raison : le COVID 19 a eu certains côtés non négligeables. Pendant quelques semaines, on en a vu moins.

Mais ils refont peu à peu surface.

*

Une dernière ? - Oui, une dernière : Les vieux !

Dans sa chronique du mois dernier, Copernique se demandait ce qui allait lui arriver en vieillissant. Voici ce qu'il disait :

«Je me demande de plus en plus comment je vais réagir lorsque mes facultés intellectuels se mettront à décliner (en supposant que je m'en aperçoive !)»

Techniquement ? À moins qu'il soit frappé par une de ces maladies de plus en plus courantes comme la démence précoce ou l'Alzheimer (*), ou encore qu'il se réfugie dans l'univers qu'il s'est créé au fur et à mesure qu'il a vécu, il n'y a aucune raison de croire que ses facultés se mettent à décliner. 

Les exemples de personnes qui ont vécu de longues vies tout en demeurant alertes, éveillés aux idées nouvelles et créatifs (surtout) pullulent. J'en nommerai plusieurs si l'espace qui m'est imparti dans cette édition du Castor™ me le permettait, mais laissez-moi juste un mot sur :

(*) La démence et l'Alzheimer

Ce ne sont pas des «maladies» nouvelles. L'usure (le vieillissement, la dégradation des cellules d'un corps humain, la non-défense contre divers phénomènes, les modifications chimiques dues à l'âge, etc.) de certaines parties de son corps n'est pas une maladie.

Cette usure existe depuis toujours sauf qu'on lui a donné de nouveaux noms et c'est là que la science me tombe un peu sur les nerfs, tout ce qu'on a fait à ce jour, c'est d'attribuer cette usure à de nouvelles causes. 

Le problème, c'est qu'en attendant qu'on trouve des solutions ou des «remèdes» à ces nouvelles causes, les résultats demeurent les mêmes :

Autrefois, on disait que cette usure débouchait sur une forme de folie ou encore une situation où, comme on disait à l'époque, «les vieux (usés) retournaient en enfance».  - Peu de  changements dans les effets, non ?

Oui, de plus en plus de gens semblent être aux prises avec des problèmes : de mémoire, de langage, d'orientation et divers autres comme celui de comportements étranges ou inappropriés accompagnés d'une transformation de leur personnalité... 

Pourquoi «de plus en plus» ? Parce que le nombre de gens âgés augmentent depuis des années grâce à la médecine moderne, mais, comparaisons pour comparaisons, il suffit de regarder autour de soi pour constater qu'il y a quand même, par rapport à la population en général, beaucoup d'octo ou de nanogénaires et même de centenaires qui, compte tenu de leur âge, vivent une vie tout-à-fait normale. 

Qu'on ne m'en parle plus.

Pour ce qui, quand même du déclin de la mémoire...

Vous pouvez lire, ailleurs dans ce site, les détails d'une grève déclenchée en je-ne-sais-plus-quelle année de la Rome antique par les professeurs d'histoire du temps après la deuxième guerre punique car ils se voyaient non seulement devoir à enseigner les causes et effets d'une première guerre, mais celles et ceux d'une deuxième sans suppléments de salaire...

Pensez alors à ce que leurs homologues d'aujourd'hui doivent enseigner et ce que leurs élèves doivent retenir... 

Pas surprenant que chacun d'entre-nous finisse par en perdre des bouts...

Une blague, oui, mais le phénomène du déclin de la mémoire chez tous les individus atteignant un certain âge a peut-être une cause autre que celle qu'on attribue généralement à la vieillesse. Arthur Conan Doyle la décrit brillament par la voix de son plus fameux personnage, Sherlock Holmes, et ce, dans sa toute première aventure (A study in Scarlet ou Une étude en rouge) :

«...Je considère que le cerveau de l’homme est, à l’origine, comme une petite mansarde vide et que vous allez y entasser les meubles qu’il vous plaît. Un sot y entassera tous les fatras de toutes sortes qu’il rencontre, de sorte que le savoir qui pourrait lui être utile se trouve écrasé ou, en mettant les choses au mieux, mêlé à un tas d’autres choses, si bien qu’il est difficile de mettre la main dessus. L’ouvrier adroit, au contraire, prend grand soin de ce qu’il met dans sa mansarde, dans son cerveau. Il n’y veut voir que les outils qui peuvent l’aider dans son travail, mais il en possède un grand assortiment et tous sont rangés dans un ordre parfait. C’est une erreur de croire que cette petite chambre a des murs élastiques et qu’elle peut s’étendre indéfiniment. Soyez-en sûr il vient un moment où, pour chaque nouvelle connaissance que nous acquérons, nous oublions quelque chose que nous savons. Il est donc de la plus haute importance de ne pas acquérir des notions inutiles qui chassent les faits utiles.»

Combien parmi vous se souvient du jour où ils ont fait leur premier voyage,  quand ils ont bu leur premier verre de vin ou qui sont encore capables de dire où ils ont assisté à leur premier concert... et qui ont, parfois, oublié la date leur anniversaire de mariage ?

Tourlou !

Simon

  Herméningilde Pérec


À la douce mémoire de :
Léonidas Josaphat Léon Pérec (1853-1942)

Comme le fait remarquer Paul dans sa chronique d'aujourd'hui la pandémie qui s'est abattue dans nos environs il y a - déjà ! - six mois a eu certains côtés non négligeables.

Ainsi, au cours de cette longue période où mes neveux et nièces m'ont formellement interdit pendant presque trois mois de sortir de chez moi, j'ai eu le temps de réfléchir souventes fois et longuement... à mon passé.

Assis dans la chaise berçante, quarante-cinq fois revernie depuis qu'elle est entrée dans ma famille, je me suis à penser il y a quelques semaines à ce qui se produirait si j'organisais une réunion des anciens de mon collège ; ceux des années cinquante qui ont terminé leur cours «classique» la même année où il m'a fallu, à vingt ans, décider ce que j'allais faire dans la vie. Puis, je me suis dit : «Pauvre vieux ! La moitié doivent être morts aujourd'hui. Quant aux autres, dans quel état seront-ils ? As-tu pensé aux fauteuils-roulants ? Aux infirmiers qui les accompagneront ? - Oublie tout ça : compte-toi chanceux d'être encore vivant et relativement en santé !» Puis tout à coup, je me suis aperçu que j'étais assis dans la chaise où j'ai vu mon grand-père pour la dernière fois :

Léonidas Josaphat Léon Pérec, né dix-sept ans avant la Confédération Canadienne.

C'était au beau milieu de la guerre. Il avait alors... comme c'est curieux ! ... mon âge d'aujourd'hui. Toute sa vie, il avait travaillé comme secrétaire-trésorier d'une usine de chaussures, aujourd'hui disparue, près de Saint-Jean (-sur-Richelieu). - Il y a longtemps que les Pérec sont en Montérégie ! - Puis il avait pris sa retraite en achetant la maison que mon père hérita, où je suis né et que j'habite toujours.

C'était un homme plutôt taciturne, d'une grande curiosité quand même. À mon retour de la petite école, il me demandait toujours ce que j'avais appris, parfois surpris d'apprendre qu'on m'avait enseigné l'usage d'un compas ou l'existence des grandes capitales de l'Europe, jusqu'au nom des ministres d'un grand dictateur allemand dont il était interdit de parler en sa présence.

Était-il cultivé ? Oui, assez. C'était un homme quand même d'un seul journal : l'Action Catholique que nous recevions par la poste avec, toujours, quelques jours de retard. Une de ses cousines, d'ailleurs, y travaillait et il ne manquait jamais de nous en faire part lorsque, par exemple, mon père ramenait à la maison une des dernières éditions du Devoir ou de La Presse. De La Patrie également, que j'aimais beaucoup parce qu'on y trouvait des bandes dessinées.- Et d'un seul livre : la Bible qu'il lisait tous les dimanches après-midi quoique... la plupart du temps les yeux fermés, ce qui faisait dire à ma mère : «Tais-toi ! Tu vois bien que ton grand-père est en train de lire...» Ce qui signifiait, naturellement qu'il dormait.

J'étais «en pension» quand il est mort, en avril '42. (Ce qu'on nous enrôlait jeune à l'époque !) - Et ce n'est qu'en mai que je l'ai appris, sans trop savoir ce que c'était la disparition d'une personne qu'on a, parce qu'elle était là depuis toujours, cru immortelle.

Aujourd'hui, je sais.

Oui, il est possible, même probable, que la moitié de mes camarades de classe soient disparus. Plus de la moitié des gens que j'ai connus n'existent plus et des gens de mon âge, j'en rencontre de moins en moins.

Et quand je lis que la pandémie a fait disparaître plus de 150,000 personnes aux États-Unis en l'espace de quelques mois, c'est un nombre qui est plus qu'une simple statistique à mes yeux.

H. Pérec

   Copernique Marshall 


Pourquoi faire simple ?

J'étais à Montréal récemment et passant devant une librairie je me suis dit : «Sait-on jamais ?» - Je suis rentré et étant peu familier avec l'endroit, je me suis adressé au commis, près de la caisse, un jeune homme au début de la vingtaine, et lui ai demandé où était la section des romans policiers. Il me dit : «Par ici, Monsieur» et m'entraîna vers une pièce à l'arrière où sur trois pans de mur se trouvaient des centaines de volumes classés en ordre alphabétique. «Vous cherchez... ?» me demanda-t-il. - «John Dickson Carr.» - Et le voilà qu'il se dirige vers la lettre «K». - «Non pas Kerr, lui dis-je, Carr. John Dikson Carr.... C-A-R-R." - «Ah», qu'il fit, puis à la lettre C, il ne trouva que des Agatha Christie, un Chandler et deux ou trois autres écrivains plus récents. - «Vous savez, dit-il. C'est la première fois que j'entends parler de cet auteur. Il est récent ?»

Je n'allais pas lui expliquer que c'était un des romanciers les plus connus dans le domaine des crimes en chambre close, mais que ces romans dataient des années trente et quarante... Je le remerciai quand même et lui dit que j'allais voir si je ne trouverais pas autre chose.. Deux, trois minutes suffirent pour comprendre que l'endroit ne vendait que les best-sellers du moment.

Une fois dehors, je me suis dit que chercher aujourd'hui, dans une librairie, un ou des livres publiés pour la première fois il y a quatre-vingts, quatre-vingt-dix ans était un acte de pur optimisme. 

Puis dans la même veine j'ai pensé à un sketch, fameux celui-là, du groupe Monty Python's, où un type (John Cleese) se voit obligé de mentionner une soixantaine de noms de fromages chez un fromager qui, finalement, doit lui avouer qu'il n'en a aucun. Ce sketch débute comme ceci :

«I was sitting in the Public Library on Sermon Street just now, skimming through Rogue Herries by Hugh Walpole when suddenly I felt peckish and, in a nutshell, I thought to myself that a little fermented curd would do the trick, so I curtailed my walposian activity, sallied forth and infiltrated your place of purveyance in order to negotiate the vending of some cheesy comestible...»

(Je ne tenterai même pas de traduire.)

Tout à fait irrésistible. Dans la même lignée, je me souvenu de ceux sur l'Inquisition espagnole ou le pourquoi Michel-Ange n'a jamais peint la Dernière Cène.

Les trois se trouveront facilement sur YouTube :

The Cheese Shop

The Spanish Inquisition

Why Michelangelo Didn't Paint the Last Supper

*

En ces temps où l'on doit se tenir à deux mètres de nos semblables, porter des masques, se laver les mains à toutes les dix minutes, il me semble qu'on ne devrait présenter à la télévision que des choses du genre ou, du moins, en quantité supérieure à ces bulletins de nouvelles où ne parle que de malheurs, de scandales en tous genres quand ce n'est pas de canicules, de tempêtes tropicales ou de feux de forêt.

Sauf que la question que je me pose est : quand a-t-on tourné, en français, des émissions comme Yes Minister, Yes Prime Minister, The Two Ronnies, Fry and Laurie... ?

Mon idée est que les Français savent se moquer, faire des calembours, imiter, pasticher, inventer de brillantes tournures de phrase, ironiser... mais ils ne savent pas rire. Enfin, pas beaucoup.

Copernique

   Jeff Bollinger


J'ai regardé, j'ai lu, j'ai écouté...

Tous les docus que j'ai pu trouver sur la mécanique quantique et...

Je n'ai rien compris.

Ma seule consolation est venue d'un des grands experts en la matière, Richard Feynman, qui dit dans une de ses conférences que «si l'on croit comprendre le monde quantique, on ne comprend pas le monde quantique» car lui-même n'y comprenait rien, sauf qu'il savait comment il fonctionnait.

Les mathématiques me fascinent. Les statistiques particulièrement et je ne sais pas pourquoi, mais il me semble que, chaque fois qu'on en présente à la télé, y'a toujours un journaliste ou un politicien qui les interprètent tout de travers.

N'est-ce pas Trump qui dit que si le nombre de personnes atteintes du COVID 19 augmente sans cesse aux États-Unis, c'est qu'on fait trop de tests.... ???

Est-ce que vous suivez sa logique ?

Hier, j'entendais un météorologue dire que la canicule était une conséquence de la hausse de la température (sic) et que les pires canicules dépendaient du facteur éolien.

Le facteur éolien !

J'ai cessé depuis longtemps de m'obstiner avec mes collègues qui disent que les automobiles exposées au vent, l'hiver, sont plus froides que celles qui ne le sont pas.

Quant au facteur humidex, il semble qu'on a compris qu'il s'agissait... d'humidité. Sauf que ceux qui disent que 45 degrés en Arizona ou au Texas, ça s'endure parce que le climat, là-bas, est sec, n'y sont visiblement jamais allés.

Vous les croyez, vous, ceux qui disent que les extra-terrestres sont parmi nous, mais qu'ils sont si supérieurement avancés en science qu'ils peuvent se rendre invisibles ?

Simon a raison (voir sa chronique d'aujourd'hui) : y'a pas mal de gens dans le monde qui disent toutes sortes de choses sans savoir de quoi ils parlent.

En attendant, je vais cesser d'essayer de comprendre la mécanique quantique, déjà que j'ai de la difficulté avec les nombres irréels.

Jeff


  Georges Gauvin


Section «Passif-Actif» du bilan d'une clouée au sol

Je n'ai pas la lecturovite, cette maladie qui nous pousse à lire tout ce qui nous passe entre les mains. Mon ex m'ayant prêté «La vie, mode d'emploi» de Georges Pérec, il y a un mois (ou deux ?), je n'ai pas réussi à en dépasser la moitié après des heures d'acharnement. Il m'avait dit : «C'est facile, tu vas voir. Ce sont de courtes histoires qui se lisent en dix minutes et dont tu n'a pas de besoin de retenir d'une à l'autre. Et ça change tout le temps.» - Courtes histoires, mon oeil ! Après quelques unes, j'ai commencé à me demander si l'artiste au troisième connaissait la dame du cinquième et de quoi il pouvait parler quand ils se rencontraient... (Vous voyez : j'invente déjà car je ne me souviens plus qui habite où dans cette fichue de maison.)

Je suis plutôt visuelle. Je regardais «Le rouge et le noir» de je ne sais plus qui avec Gérard Philippe et Danielle Darrieux à la télé l'autre jour. Quel beau film ! - On m'a dit que le roman sur lequel il était basé était un grand classique, qu'il était cent fois meilleur que le film. - Pas question que je lise un roman dont je connais l'histoire,

Regarder un film, c'est passif qu'on me répète alors que lire exige une certaine activité.

Activité ? Je suis active. Me déplacer pour aller entendre la Messe en Si mineur de Bach à la Place des Arts, c'est, pour moi, une activité (ce que j'ai déjà fait) ou me rendre à l'église Notre-Dame pour le Messie d'Haendel aussi (ce qu'ai déjà fait) et si Julien Clerc vient à Montréal, j'irai le voir.

Aller au Musée des beaux-Arts voir une exposition, c'est pas actif ça ?

 *

J'aurais aimé voyager. Voir Paris, Londres, Rome, Istanbul, les pyramides en Égypte, Rio, le Japon, la muraille de Chine. mais pour voyager, faut des sous. Et même si j'en avais, aujourd'hui, j'ai bien peur que tout cela serait impossible.

Reste les docus à la télé. mais c'est pas comme être là.

Une amie m'a prêté sa série de Time-Life sur la peinture. Je suis tombé en amour avec Modigliani et Franz Hals. 

Copernique m'a dit qu'il faut voir au moins un Pollock dans sa vie, ne serait-ce que pour s'y perdre car, paraît-il, ses toiles sont immenses.

J'ai passé proche, une fois. À New York. Le plus loin que je me suis rendu de ma ville natale de Saint-Hyacinthe. mais c'était avec mes parents et les musées, pour eux... Quand même : j'aurai vu la statue de la Liberté, le Rockefeller Center, l'Empire State Building et de loin, les deux tours du World Trade avant qu'elles disparaissent..

Je serai en vacances la semaine prochaine. je pense que je vais aller voir le Jardin botanique. Et, à pieds, je vais «faire» le Plateau d'un bout à l'autre. Paraît que...

George

   Fawzi Malhasti


Morceau choisi

«Pour faire partie du "petit noyau", du "petit groupe", du "petit clan" des Verdurin, une condition était suffisante mais elle était nécessaire : il fallait adhérer tacitement à un Credo dont un des articles était que le jeune pianiste, protégé par Mme Verdurin cette année-là et dont elle disait : "Ça ne devrait pas être permis de savoir jouer Wagner comme ça !", "enfonçait" à la fois Planté et Rubinstein et que le docteur Cottard avait plus de diagnostic que Potain. Toute "nouvelle recrue" à qui les Verdurin ne pouvaient pas persuader que les soirées des gens qui n’allaient pas chez eux étaient ennuyeuses comme la pluie, se voyait immédiatement exclue. Les femmes étant à cet égard plus rebelles que les hommes à déposer toute curiosité mondaine et l’envie de se renseigner par soi-même sur l’agrément des autres salons, et les Verdurin sentant d’autre part que cet esprit d’examen et ce démon de frivolité pouvaient par contagion devenir fatal à l’orthodoxie de la petite église, ils avaient été amenés à rejeter successivement tous les "fidèle" du sexe féminin.

«En dehors de la jeune femme du docteur, ils étaient réduits presque uniquement cette année-là...»

«...»

«Mais tandis que, une heure après son réveil, il donnait des indications au coiffeur pour que sa brosse ne se dérangeât pas en wagon, il repensa à son rêve ; il revit, comme il les avait sentis tout près de lui, le teint pâle d’Odette, les joues trop maigres, les traits tirés, les yeux battus, tout ce que – au cours des tendresses successives qui avaient fait de son durable amour pour Odette un long oubli de l’image première qu’il avait reçue d’elle – il avait cessé de remarquer depuis les premiers temps de leur liaison, dans lesquels sans doute, pendant qu’il dormait, sa mémoire en avait été chercher la sensation exacte. Et avec cette muflerie intermittente qui reparaissait chez lui dès qu’il n’était plus malheureux et qui baissait du même coup le niveau de sa moralité, il s’écria en lui-même : "Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre !"»

Marcel Proust - Du côté de chez Swann

Fawzi

   Paul Dubé


Tuba Skinny

J'ai l'impression qu'on considère trop souvent le jazz dit de «Nouvelle-Orléans» comme étant dépassé, vieux jeu, trop simpliste et même naïf par rapport au jazz dit «moderne».

D'un autre côté, des types comme Hugues Panassié, n'ont jamais cessé de dire que, depuis la venue du Bop, le jazz (sous entendu : tout ce qui est issu de la Nouvelle-Orléans ou de l'époque Swing) est disparu, allant (Panassié) jusqu'à dire, dans son dernier livre (*), que Miles Davis était (est) «un modèle de l'anti-jazz», qu'il avait «délibérément tourné le dos à la tradition musicale de sa race (sic), etc., etc.»

(*) Dictionnaire du jazz, Albin Michel - 1971.

Sans vouloir souligner que certains styles qu'on qualifie de jazz, aujourd'hui, me semblent suspects (quand on invite des danseurs de flamenco ou des groupes de musiciens antillais à se manifester dans divers Festival [dit] de Jazz - celui de Montréal, par exemple), je ne tiens vouloir insinuer que le véritable jazz est né avec Charlie Parker et qu'il est mort depuis la disparition de Coltrane. Non.

Mon idée est qu'il existe des styles de jazz et que chacun d,entre eux droit à être entendu pour ce qu'il est et non pour ce qu'il a été ; qu'on ne doit pas juger démodés des musiciens qui volontairement tiennent à utiliser des formes qui sont loin d'être désuètes. - Qui oserait dire que la Valse numéro 2 de Chostakovitch ou celle de Ravel sont des aberrations parce que la valse est une forme qui date de la fin du XVIIIe ?

Et les quatuors à cordes, il faut les bannir ?

Oui, c'est vrai : il existe dans le cocktail bars du monde entier trop de pianistes qui se prennent pour Nat King Cole. Ce n'est pas parce qu'ils essaient d'imiter Nat King Cole que je leur en veux, c'est qu'ils l'imitent mal. - On ne peut, hélas, demander à tous, d'être des Keith Jarret, des Ahmad Jamal, des Chick Corea ou, tant qu'à y être, des Art Tatum ou même des - et là je remonte loin - des Jelly Roll Morton. Mais entre tous ces musiciens, il existe un trait commun et c'est celui d'improviser sur certaines formes qui, elles, demeurent inchangées depuis des décennies, que ce soit le rag, le boogie, le blues ou la ballade.

Aussi, quand j'entends du jazz joué par des groupes qui utilisent la forme et le style des premiers orchestres de Nouvelle-Orléans, je ne ferme jamais les oreilles.

Tuba Skinny ? C'est un groupe dont les membres ne proviennent pas de la Nouvelle-Orléans, mais qui ont décidé d'en adopter lee style. (Leur directrice, Shaye Cohn [cornet et piano], est la petite fille du saxophoniste Al Cohn et elle est née à Boston. Sa formation ? Classique.)

On peut les voir et entendre à profusion sur YouTube.

Fortement recommandé.

paul

Lectures

À propos de :

Marceline Desbordes-Valmore
Edna St.Vincent Millay
et
Marguerite Yourcenar

La pandémie aura eu certains bons côtés. De nombreuses personnes qui avaient eu, jadis, l'habitude de lire, s'y sont tout à coup remis. D'autres qui ne pensaient à rien, se sont mis à réfléchir comme ils le faisaient quand ils étaient plus jeunes : quel est le sens de la vie ? où allons-nous ? que nous arrivent-ils après la mort ? - Des parents ont redécouvert leurs enfants et des enfants leurs parents. Des amitiés se sont formées entre voisins.  Des adolescents se sont aperçus que ne pas faire la fête à tous les week-ends n'était pas la fin du monde. Des malheurs, des ennuis, oui, il y en a eu et nous ne sommes pas encore sortis du bois ou de l'auberge (selon la région du monde qu'on habite). Mais pourquoi penser qu'aux mauvais côtés ?

Personnellement, le COVID 19 m'a permis de découvrir des aspects cachés de mes deux bibliothèques : celle qui est constituée de livres physiques et à laquelle j'ai cessé depuis longtemps de regarder avec une certaine fierté et qui pourtant la mérite avec ses volumes de la Pléiade, son fond(s) proustien et ces raretés, et l'autre de laquelle j'ai  pris l'habitude d'en ignorer jusqu'à l'étendue, l'électronique, qui se trouve dans mon ordinateur ou ma tablette.

C'est ainsi que je me suis aperçu l'autre jour que les deux contenaient quand même beaucoup de livres écrits par des auteurs (*) féminins auxquels je n'avais vraiment jamais fait attention. Je ne veux dire par là que je les ai toujours ignorées avant, pendant et après les avoir lues, mais que, pour une raison quelconque, il m'est rarement venu à l'esprit de les mentionner ou d'en parler.

(*) Pour la féminisation des textes, voir ma chronique d'aujourd'hui.

Comme le titre de cette chronique l'indique, trois me sont revenues en tête récemment : Marceline Desbordes-Valmore, Edna St. Vincent Millay et Marguerite Yourcenar. Et puis tandis que j'y suis, pourquoi ne pas mentionner un quatrième nom : celui de Virginia Woolf.

Et puis, tranquillement, j'en suis venu à me demander quelle importance ces femmes avaient dans ce que j'appelle pompeusement - et seulement quand je suis tout seul, dans le noir - mon «univers littéraire». Si une ou deux d'entre elles pourraient avoir une place dans mes dix, mettons vingt auteurs préférés ou, encore mieux, si, sincèrement, je serais prêt à les considérer comme étant essentielles dans la littérature du monde occidental (la seule que je connaisse) et dans toutes ces époques

(Pour ceux qui voudraient tout de suite me poser la question à savoir si je n'ai que des livres de ces quatre auteurs féminins dans ma bibliothèque, la réponse est non. J'en ai d'autres. Y compris des textes de poèmes extraordinaires, des lettres à lire et relire de même des romans que des amies m'ont demandé de lire et quelques autres que j'aurais de la difficulté à donner...)

Pour les deux premiers de mes auteurs préférés - tous sexes confondus -, je n'ai pas le choix : les immuables Shakespeare et Proust. Et je ne vous dirais pas qui pourrait être devant l'autre. Ce serait me me demander si les côtes normandes sont plus belles que les plages de la Méditerranée. C'est à partir du troisième que je me mets à hésiter. Déjà que je change d'idées à tous les deux jours, tout dépendant de ce que je viens de lire... Un jour, c'est Céline, le lendemain Verlaine, puis le surlendemain Joyce... Et comment classer Julien Green dont je n'ai lu que le Journal, Wilde dont je n'admire vraiment qu'une seule pièce  ? Et quoi faire de Hugo, de l'incontournable Gide et, plus récemment, de Borgès ? - Sur le coup, j'allais même oublier Pessoa, Saint-Simon, Pline le Jeune, Molière, Racine, La Fontaine...

La vie d'un critique lecteur amateur n'est pas facile !

Mais si nous revenions à nos quatre... femmes ?

Les classer, elles, dans l'ordre de mes préférées, aujourd'hui (car demain j'aurai changé d'idée), ne me pose aucun problème car, en oubliant systématiquement leur qualité littéraire individuelle, je n'ai aucune hésitation à dire :

  • Edna St. Vincent Millay

  • Marceline Desbordes-Valmore

  • Marguerite Yourcenar
    et

  • Virginia Woolf

Pour les deux premières - considérez les ex-aequo - je n'ai effectivement aucune hésitation car toutes les deux m'ont ému plusieurs fois aux larmes. - Les sentiments qui se dégagent de leur poésie dépassent tout ce que j'ai pu lire, même chez Verlaine. - Les «You all lied to me» et «If I should learn...» de St-Vincent Millay de même que le «N'écris pas» de Desborde-Vallemore sont des chefs-d'oeuvre qu'aucun homme aurait pu écrire.

Pour les deux autres, j'hésite un peu à classer Yourcenar en troisième position. Le fait qu'elle ait gagné le prix Femina me la rend un peu suspecte, mais, je me dis que même le jury du Femina a eu, pour une fois, le droit de s'être trompé, tout comme celui du Goncourt qui lui ne s'est pas gêné au moins trois fois. Et puis, je me sentirai toujours obligé de comparer Miss Dalloway au dernier chapitre de l'Ulysse de James Joyce. - Alors, OK pour Yourcenar en troisième place.

Reste à déterminer comment les classer, ces quatre génies dans la littérature (le mienne, je répète) masculin-féminine ou féminin-masculine.

La pandémie aura eu certains bons côtés.

Elle m'a permis de confirmer ce que j'ai toujours pensé : que comparer des hommes aux femmes ou des femmes aux hommes, c'était comme... choisir entre le parapluie et la machine à coudre sur la table à disséquer de Lautréamont :

Les femmes nous rendent fols, les hommes nous rendent fous.

Mais puisqu'il le faut :

St-Vincent Millay, et Marceline Desbordes-Valmore, je les classerais bien avant Verlaine, derrière cependant la plupart des sonnets de Shakespeare, mais aussi derrière d'excellents vers de Baudelaire, Aragon et probablement Hugo. Attention, hein : je dis biens «derrière d'excellent vers» - poèmes, si vous le voulez - et non les oeuvres entières de ces trois derniers car toutes les deux les surpassent, et de loin, dans certains poèmes. - Quand on a lu une fois «The Ballad of the Harp-Weaver» de St-Vincent Millay, on s'en souvient longtemps.

Côté romanesque, je conseillerais volontiers à quiconque n'a jamais lu «Les Mémoires d'Hadrien» de Yourcenar et surtout son «Oeuvre au noir», de lire ces deux volumes bien avant l'illisible «Ulysse» de James Joyce. Et pour Virginia Woolf, débutez donc avec son «Room with a View». Ce sera plus facile à lire que son «Mrs. Dallaway».

Et puis tout à coup, je me sens bien coupable d'avoir oublié dans ces commentaires écrits sur le coup de certaines émotions reliées à un déplacement tout à fait fortuit de divers livres (tous mes livres sont classés dans ma bibliothèque par ordre d'éditeurs ou de grandeurs)... les admirables soeurs Brontë, George Elliot, Daphné du Maurier, Colette,  Madame de Staël... sauf que j'aurai eu le plaisir de ne pas mentionner Georges Sand ni Simone de Beauvoir qui, heureusement, comme disait Jacques Guimard à propos des critiques d'Asimov, «sont tombé dans un oubli miséricordieux».

Simon

P.-S. : Je viens de me relire et je réalise que j'ai oublié de mentionner Henriette Dessaules dont j'ai relu trois fois le Journal qu'elle a tenu au cours de son adolescence. (Bibliothèque du Nouveau Monde - Les Presses de l'Université de Montréal, 1989). De quoi dire - oui je sais, c'est sacrilège - à Ann Frank de cesser de nous attendrir.


(Cliquer pour agrandir)

*

Une banale histoire
(Fragment des mémoires d'un homme vieux)
Anton Tchekhov
Paris, Plon, 1923

«Comme par le passé, je ne fais pas mal mes cours. Je puis, comme jadis, soutenir l’attention de mon auditoire pendant deux heures. Mon feu, le ton littéraire de mon exposé et mon humour empêchent presque de remarquer l’insuffisance de ma voix qui est sèche, aigre et chantonnante comme celle d’une bigote. Par contre, j’écris mal. La cellule de mon cerveau qui préside à la faculté d’écrire refuse le service. Ma mémoire a baissé ; je n’ai plus de suite dans les idées et, quand je les couche sur le papier, il me semble que j’ai perdu le sentiment de leur lien organique. La construction est monotone, la phrase pauvre et timide. Souventes fois je n’écris pas ce que je veux. En écrivant la fin, je ne me rappelle plus le commencement. Souvent, j’oublie les mots usuels ; dans tous les cas je suis obligé de dépenser beaucoup d’énergie pour éviter dans mes lettres les phrases inutiles et les incidentes superflues.

Tout cela démontre clairement l’affaiblissement de mon activité cérébrale.»

Ce passage du conte cité ci-dessus n'est pas exactement une véritable illustration du style Tchekov. Pour cela, il faudrait citer un de ses contes ou une de ses nouvelles en entier, mais lequel ou laquelle ? Ceux et celles que j'ai lus m'ont tous semblé d'une similarité parfaite mais en même temps totalement différents entre eux.

*

Tchekhov a écrit, outre un roman policier, seize pièces de théâtre et divers autres écrits en plus de ces six-cent quarante-neuf récits  et nouvelles au cours de sa vie, principalement entre 1883 et 1887.

*

Une banale histoire d'Anton Tchekhov est disponible gratuitement et peut être lue en différents formats (EPUB, MOBI, Word, PDF, etc.) sur le site de la BeQ (Bibliothèque électronique du Québec  ) à cette adresse : 

https://beq.ebooksgratuits.com/classiques/Tchekhov-banale.pdf

Simon

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Romans policiers

De nouveaux comentaires s'ajouteront sous peu à ceux déjà présents.

 *

Magazines :

              

(Source - images : HBO.COM)

   À ne pas manquer non plus, sur YouTube le numéro spécial du Nationalist Geographic :

(https://www.youtube.com/watch?v=8x1-CVsoEBU)

L'extrait du mois


Les passantes

Je veux dédier ce poème 
A toutes les femmes qu'on aime 
Pendant quelques instants secrets 
A celles qu'on connaît à peine 
Qu'un destin différent entraîne 
Et qu'on ne retrouve jamais 

A celle qu'on voit apparaître 
Une seconde à sa fenêtre 
Et qui, preste, s'évanouit 
Mais dont la svelte silhouette 
Est si gracieuse et fluette 
Qu'on en demeure épanoui 

A la compagne de voyage 
Dont les yeux, charmant paysage 
Font paraître court le chemin 
Qu'on est seul, peut-être, à comprendre 
Et qu'on laisse pourtant descendre 
Sans avoir effleuré la main 

À la fine et souple valseuse
Qui vous sembla triste et nerveuse
Par une nuit de carnaval
Qui voulut rester inconnue
Et qui n’est jamais revenue
Tournoyer dans un autre bal


A celles qui sont déjà prises 
Et qui, vivant des heures grises 
Près d'un être trop différent 
Vous ont, inutile folie, 
Laissé voir la mélancolie 
D'un avenir désespérant 

À ces timides amoureuses
Qui restèrent silencieuses
Et portent encor votre deuil
À celles qui s’en sont allées
Loin de vous, tristes esseulées
Victimes d’un stupide orgueil


Chères images aperçues 
Espérances d'un jour déçues 
Vous serez dans l'oubli demain 
Pour peu que le bonheur survienne 
Il est rare qu'on se souvienne 
Des épisodes du chemin 

Mais si l'on a manqué sa vie 
On songe avec un peu d'envie 
A tous ces bonheurs entrevus 
Aux baisers qu'on n'osa pas prendre 
Aux coeurs qui doivent vous attendre 
Aux yeux qu'on n'a jamais revus 

Alors, aux soirs de lassitude 
Tout en peuplant sa solitude 
Des fantômes du souvenir 
On pleure les lèvres absentes 
De toutes ces belles passantes 
Que l'on n'a pas su retenir

Antoine Pol (Août 1888 - Juin 1971)

Note : Ce poème a été mis en musique par Georges Brassens (album Fernande, 1972) sans les strophes quatre et six (en italiques ci-dessus).

Le courrier


M. Évariste Poisson, m.d. (à la retraite) - St-Jérome, Québec

«J'ai beaucoup hésité avant d'accepter de participer à cette rencontre, me disant que tous ceux qui allaient nous écouter passeraient une soirée à nous entendre expliquer, de toutes les façons possibles et impossibles,que nous n'avions aucune idée de ce qui peut se passer après la mort.» (Sam Harris)

Mme Édith Talon, née Berthelette - Lorient, France

Un 6UP, un Channel No. 4, une préparation G, Henry IX de Shakespeare, deux disques de 76 tours, le Ketchup Heinz 56 et les 22 heures et demi du Manche.

M. Gabriel Deschamps - Le Grand-Quévilly, France

Cheez-Whiz, Map-O-Spread, Klik, Kam, Kik Cola, Kraft TV Dinner et les Ice Capades.

Mr. Sumner Senneville - St-Catherines, Ontario

Paul-Louis Courier (1772-1825), le plus célèbre des pamphlétaires français.

S. Affiano Delucci - Treviso Bresciano BS, Italia

Le verbe chaloir n'a pas de futur antérieur mais un futur proche, : «Il va chaloir...»

Dédicace


Cette édition du Castor est dédiée à :

Julien Green
(1900-1998)

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 Toulouse-Lautrec : L'oeuvre lithographique complète  
370 photos des lithogravures de Toulouse-Lautrec     

Schubert
un essai de Paul Dubé
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Autres sites à consulter :


Webmestre : France L'Heureux

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Webmestres : Paul Dubé et Jacques Marchioro

Le mot de la fin


 R.I.P. 


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