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Simon Popp
Proust, Louis-Ferdinand Céline, Joyce et les
imposteurs
Relu au cours des dernière semaines Voyage au bout de la nuit
et plus de la moitié de Mort à crédit de Louis-Ferdinand Céline et, après m'être penché plus ou moins récemment
sur d'autres classiques (notamment sur
À la recherche du Temps perdu
en compagnie de Copernique et
de Paul) j'en suis venu à la conclusion que le monde littéraire -
non : le monde de ceux qui se disent connaisseurs en littérature - était composé en majeure partie de snobs et de
prétentieux.
Une rumeur veut - enfin : me semble avoir lu quelque chose de semblable quelque part il y a
plusieurs années dans «Les carnets du Major Thompson» de Daninos
?
- qu'à Paris, lorsqu'on pose une question, personne n'osera vous répondre : «Je ne sais pas.» Plutôt embêtant, surtout quand on demande où se trouve telle ou telle rue. Sauf que c'est une chose qui ne m'est jamais arrivée.
Ce qui cependant m'est arrivé souvent, et qui continue de m'arriver régulièrement, c'est de me faire expliquer
- littéralement EX-PLI-QUER - Proust, Céline, Gide... par des gens qui, visiblement ne les ont jamais lus. C'est surtout vrai à propos de Céline dont la plupart des lecteurs que j'ai connus, se sont limités aux dix, vingt premières pages de son
Voyage au bout de la nuit et quelques phrases de ses pamphlets et qui ne font que répéter ce qu'ils en ont lu dans un article d'un journal,
un numéro du
Magazine littéraire ou numéro hors-série de la revue Lire.
Ces gens-là me font penser au frère d'une de mes ex-amies qui, membre des AA
(Alcooliques Anonymes), se
permettait de donner des conseils sur l'achat de vins, récitant de mémoire ce
qu'il en avait lu, la veille, dans
La Presse ou Le Devoir. C'était le même qui avait, d'ailleurs, des opinions sur TOUT : les derniers films, les derniers livres, les
récitals ou pièces de théâtre en cours ou à venir et, à ce qu'on
m'a dit, le sport.
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J'ai pensé à lui il
n'y a pas longtemps après être tombé sur la pub [à gauche]
parue dans le magazine Historia en mars 1963 à peu près
à l'époque où le Dale Carnegie & Associates
semblait
avoir atteint son apogée quoique cette société (?) - avec
franchises, etc. - est toujours active..
Qui était Dale Carnegie ?
Le second fils, né en
1888, d'un fermier du Missouri qui, de vendeur de cours
par correspondance, de bacon, de savon et de saindoux, a voulu
devenir comédien puis s'est transformé en un conférencier qui
finit par donner des conférences sur l'art de donner des conférences.
Il devint célèbre en 1932 en publiant How to Win Friends
and Influence People (Comment se faire des amis) qui
n'a jamais cessé, depuis, d'être vendu en plusieurs millions
d'exemplaires après avoir été traduit en... 37 langues.
Sa méthode de «se faire des amis et...» est
très simple :
D'abord on écoute, ensuite on flatte et,
conseil important : on n'oublie jamais les nom de ses interlocuteurs.
Le reste vient naturellement : on fait
semblant, mais jamais trop longtemps car les gens avec qui l'on
entre en communication finiront par s'apercevoir que l'on est un imposteur.
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Pour Proust, l'imposture est facile à déceler
: ceux qui l'ont lu - mais vraiment lu - l'ont lu deux fois et très
lentement lors de leur seconde lecture, une manie qu'ils ont développée en lisant la première
fois la dernière
partie d'A la recherche où ils ont constaté, avec une certaine
déception, que l'oeuvre qui venait de les fasciner depuis un long
moment avait une fin ; et quand ils ont finalement atteint cette fin, ils ont réalisé qu'ils
avaient passé à côté de l'essentiel d'À la recherche en n'ayant
attaché de l'importance qu'aux personnages et aux histoires les
concernant alors que, ce qui devient évident à sa relecture, le but
visé par Proust était tout à fait différent, ses personnages et ses
histoires n'étant qu'un moyen pour atteindre ce but.
(C'est, à mon avis, ce qui différencie
les oeuvres écrites pour divertir et les oeuvres de nature littéraire.
- Comme cela est souvent écrit sur les routes traversant des rails de
chemin de fer : «Attention : un train peut en cacher un autre.» )
Une
autre caractéristique de ceux qui ont véritablement lu Proust est de
n'en parler que vaguement, un peu à la Swann, donnant des précisions
ou des renseignements sur certains détails plutôt que d'émettre une véritable
opinion. Cela s'explique (un tuyau pour épater la galerie à ceux
qui ne l'ont jamais lu) par un mot de Shelby
Foote (1916-2005) [*]
qui en était à sa neuvième lecture peu avant sa mort, un mot
d'un bonhomme qui a consacré sa vie à l'écriture : «On
apprend toujours quelque chose en relisant Proust. Quand on sait où il
s'en va, c'est une véritable et continuelle découverte de noter
comment il s'est pris pour nous y amener...»
[*] Une superbe interview de Shelby Foote, où il
parle en particulier de son métier d'écrivain, se trouve sur YouTube.
À écouter deux fois plutôt qu'une.
Les imposteurs céliniens sont plus
subtils : ils parlent de son antisémitisme, des sa langue argotique,
presque parlée, et de quelques épisodes où il est question de guerre
ou de travail en usine. - Tout cela est bien présent dans Voyage au
but de la nuit, mais si on leur demande pourquoi Céline utilise tant de passés
définis dans ces phrases dites parlées, et des plus que parfait du
subjonctif régulièrement, quand on leur parle de la famille Henrouille
(voir notre extrait, cette semaine) ou de l'expérience de Ferdinand en
clinique... tout finit par Céline en prison au Danemark...
Fait vécu : je n'ai connu de tous les céliniens
que j'ai rencontrés qu'un seul qui, après avoir lu le Voyage
s'est immédiatement attaqué (et lu) à ce qui est probablement son
chef-d'oeuvre, Mort à crédit.
Permettez ici que je cite un grand célinien en la personne de Régis Tettamanzi, auteur de «Voyage
au bout de la nuit - [D'après son manuscrit]» -
Édition 8, Québec, 2016 : :
«Une des conséquences [... (des
recherches effectuées sur le manuscrit du Voyage) ...] a été d'en finir avec l'illusion de
la spontanéité célinienne, celle d'un auteur qui écrirait comme on
parle. A contrario, l'étude des manuscrits a montré combien l'écriture
de Céline était le résultat d'un travail patient, parfois inlassable,
au terme duquel se trouvait reconstruit le simulacre d'un tel
jaillissement, oral, oral et populaire.»
Comme c'est bizarre (Jouvet) qu'on ne
parle plus de Balzac, de Zola ou de Victor Hugo de nos jours...
Un indice :
On n'en parle plus car les critiques
contemporains ont peur de démontrer qu'ils ne connaissent pas grand
chose sauf lire ce qui pourrait devenir un gros vendeur.
Ce dont je me rappellerai toujours, ce
sont les petites fesses et les beaux yeux d'une critique de cinéma à
la télévision qui,
ayant trouvé un film particulièrement magnifique, ne savait pas
comment prononcer son titre : Valkyrie. - Elle a été peu de
temps après mutée au sport. Son âge ? Vingt-deux, vingt-trois ans.
Note :
Je ne sais pas si le magazine Historia (qui existe toujours) accepte encore de la publicité du genre
améliorer votre personnalité ou comment guérir son urticaire en quatre
jours, mais ça aura été
un moment une de ses normes considérant les quelques numéros que j'ai récemment consultés. À sa décharge, je peux quand même dire qu'à une certaine période, notamment au cours des années
cinquante et même soixante, la publicité en général n'avait pas comme principe fondamental la totale vérité.
***
Fond de tiroir
De la difficulté de vieillir J'ai
une amie avec qui, pendant des années, je me suis toujours très bien entendu,
mais pour qui, depuis quelque temps, je suis devenu vieux jeux,
misogyne, grégaire et plus récemment paternaliste. - Comme ça, en l'espace de quelques mois, je
suis devenu pour elle quelqu'un d'agressif, qui ne ne dit que
des bêtises, qui ne fait que proférer des lieux communs et qui, de
surcroît, est devenu condescendant. Ma
réaction ? Je trouve très curieux, surtout à mon âge, d'avoir en si
peu de temps non seulement évolué vers le pire, mais changé du tout au
tout ; d'être devenu en quelque sorte quelqu'un que je ne reconnais plus. - Si j'eusse
su, j'aurais fait semblant de ne pas vieillir et de trouver génial tout
ce qu'elle fait. *
On m'a dit il n'y a pas longtemps que
je n'avais aucun droit à dire quoi que ce soit sur les politiciens car je ne votais que
rarement. Au contraire : je peux en dire n'importe quoi car ce n'est pas moi qui les
a mis en place. Ce qui me rappelle que,
les lendemains d'élections, il est rare de rencontrer des électeurs
qui ont voté pour ceux qui ont été élus. Je
vais corriger mon tire et dorénavant m'en prendre non plus à ces
politiciens mais aux électeurs qui
supportent qu'on leur donne le choix entre deux, parfois trois et,
dans certains comtés, jusqu'à cinq crétins et rien d'autre. *
L'autre jour, j'ai repensé à une de
mes ex-amies - la même que tout-à-l'heure - qui ne commettait jamais d'erreur. Le genre de celles qui, ayant sorti du frigo et échappé un litre de
lait sur le plancher de la cuisine, réussissait à
blâmer leur conjoint qui l'avait, forcément, mis trop près de la
porte.
Simon
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Herméningilde Pérec
La rentrée
Que n'a-t-on dit sur la ou les
rentrées qui n'a point été dit ou énoncé au delà de nos
murs et ailleurs, plusieurs et maintes fois sous la forme de
remarques ou commentaires tout aussi nets que précis par des
experts et connaisseurs sachant tous les trucs et astuces pour ne
pas redire ou répéter ce qu'ils ont déjà exprimé ou énoncé
dans des allocutions et des discours allant de ce que cette ou
ces entrées signifiaient à ce qu'elles étaient en réalité.
Elle aura lieu demain. Ou
aura-t-elle lieu ? (Et non pas «Où aura-t-elle lieu ?»)
Une grande majorité, c'est-à-dire
la plupart de nos étudiants, sont déjà là, une partie ayant
terminé leur session d'été et sont en attente, avec ceux de
l'autre partie, l'aurore de la session d'automne dont les lueurs,
au moment où je rédige ces modestes lignes, soit maintenant, se
pointent à l'horizon, pour repartir à neuf vers de nouvelles
notions et connaissances via des séances de formation et
d'enseignement qui leur permettront de se tailler une place et d'être
présent dans l'avenir et le futur.
Nous reste plus qu'à leur dire
le mot d'un général du Premier Empire (né et mort à Nantes
(26 décembre 1770 - 29 janvier 1842) et leur souhaiter bonne
chance.
H. Pérec
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Copernique Marshall
K7, CD, USB, MP3, MP4...
Steve Guttenberg, non le comédien,
mais le chroniqueur dont la carrière a débuté en tant que
projectionniste de films et qui s'est transformé en revendeur de
produits haut-de-gamme pour audiophiles avant de devenir un
critique sur les ondes de CNET, posait en avril dernier une
question que je me suis longtemps posé :
«Anybody out there still listening to music on AM or FM
radio ?»
(«Y'a-t-il encore keklun
qui écoute de la musique sur les bandes AM ou FM ?»)
Sa réponse :
«Radio isn't dead yet, but its future isn’t exactly healthy.»
«La radio n'est pas encore
disparue, mais sa santé n'est pas ce qu'il y a de plus
encourageante.»
(Merci, Madame Malhasti !)
Ayant à me déplacer
constamment, il y a longtemps que j'ai cessé d'écouter la radio
dans mon auto. - Bien avant la venue du Rap ou les différentes
chaînes de preachers aux USA. - Et, à bien y penser, je me
demande quand, pour la dernière fois, j'ai entendu le son d'une
radio... à la maison... - Oh, bien sûr, j'aime bien me
renseigner sur les conditions de la route ou de la circulation, mais depuis la venue des GPS et de divers apps,
je n'ai plus à écouter ces affreuses chaînes où l'on me dit
que je suis dans ou que je me dirige vers un embouteillage sans m'indiquer
comment m'en sortir ou les voies ou
routes de contournements.
Je ne me souviens plus
exactement quand, mais il y a quelques années de cela, mon poste
étant branché sur une des radios-communautaires américaines,
j'ai écouté un fort intéressant documentaire sur
je-ne-vous-dirai-pas-sur-quoi (sauf que ça avait rapport avec
les autopsies) et, ayant à traverser un fuseau horaire, j'ai dû
changer de chaîne pour me retrouver, dans un autre état américain,
au début de la même émission.
Et puis il y'a aussi eu la fois où
j'avais mis dans mon coffre à gants la trentaine de CDs de Brilliant
Classics contenant, dans l'ordre habituelle, les cent ou cent
quatre symphonies de Josef Hadyn pour m'arrêter dans un centre
commercial après l'écoute d'une soixantaine, pour acheter autre
chose, histoire de ne pas
devenir cinglé.
Puis vint les MP3 et sur ma
plus récente voiture de quoi les faire jouer via un clé USB.
L'invention miracle !
Aussi, maintenant je me prépare
des programmes avant d'entreprendre n'importe quel voyage. -
Oui, mais pas de musique. - J'écoute maintenant des conférences.
Je vous ai déjà dit, je
crois, à quel point certains essayistes de la fin du XIXe était
difficiles à lire. Particulièrement John Ruskin. Mais
maintenant, on peut les écouter.
Voici trois adresses où vous
pourrez dorénavant entendre lues différentes conférences qui à l'origine de
publications écrites :
Learn
Out Loud
LibriVox
AudioBook
Treasury
Et il y en d'autres ! Et en
français également ! Voltaire, Proust, Guillemin, Molière,
Racine...
C'est tout à fait gratuit. Des
volontaires lisent des textes libres de droit et voilà ! Et
tout ça peut être récupéré et gravé sur le disque de votre
ordinateur, sur un CD ou une clé USB.
J'en suis à me souhaiter de longs
voyages... du genre une heure, une heure et demi pour faire les
quelques kilomètres qui me séparent du centre-ville de Montréal.
Copernique
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Jeff Bollinger
Est-ce que comprenez quelque chose aux droits d'auteurs ?
Moi, non.
Oh, je peux
comprendre qu'un auteur, un compositeur et même un interprète
puisse être rémunéré pour ce qu'il fait, mais tout ce que je
vois de plus en plus, ce sont : 1) des maisons d'édition qui
sont devenues des quasi-empires et 2) des comédiens, des interprètes et quelques
auteurs qui finissent par s'acheter des châteaux,
des autos et des jets privés que certains millionnaires
auraient de la difficulté à se payer.
Est-ce normal
qu'après avoir «créé» deux chansons, des auteurs,
compositeurs ou interprètes deviennent richissimes pour,
ensuite, ne plus rien faire du reste de leur vie alors que
certaines artistes qui mettent vingt ans à écrire leur roman ou
composer leur symphonie meurent dans la misère ?
Et qu'est-ce que
c'est que cette histoire de 50 ans, 75 ans (99 au Mexique), après
la mort d'un créateur, où leurs droits sont transférés à leurs arrières-petits-enfants
?
Remarquez que je
n'ai aucune solution à ce - disons-le -
problème, mais il y'a définitivement quelque chose qui cloche là-dedans.
Heureusement, avec
les photocopieuses, les reproductrices de CD et bientôt des
copies authentiques de toiles et de sculptures, ces abus-là
(car c'en sont) vont se stabiliser quelque peu, mais ce fera de
nous tous des hors-la-loi.
Je me posais ces
questions il n'y a pas si longtemps quand un voisin m'ayant «prêté»
deux films que je voulais voir, je me suis aperçu qu'il les
avait enregistrés à partir d'originaux qu'il avait, à son
tour, empruntés à la bibliothèque de notre quartier. -
Question : est-ce que je n'ai pas enfreint pas une loi quelconque
concernant les droits d'auteur en les faisant tourner sur mon
lecteur de DVD... plutôt que d'aller les chercher directement et
gratuitement à l'endroit où il les avait trouvés ?
Je sais : il
aurait fallu que je me déplace, que je consomme de l'essence,
pour me rendre là. - Les producteurs de ces deux DVD
seraient-ils de connivence avec les compagnies de pétrole ?
Et que dire des
livres que j'ai achetés à mes enfants et qui les refilent à
leurs amis ? Ou de ceux que je pourrais revende au quart du prix à un
libraire qui les revendra le double à un client soit à la moitié
du prix original ?
Chose certaine,
payer 20$ un CD qui en coûte 3$ à un distributeur, qui en
vendra à des millions de copies, ça me semble un peu exagéré.
- Et si on forçait chaque interprète de signer chaque copie ?
Et puis tant pis,
si je me suis procuré sur DVD la cinquième de Beethov' par XYZ
et que j'en extrait la bande sonore pour l'écouter dans mon
auto, qu'on vienne me chercher pour me mettre en prison, je
plaiderai coupable ou - qui sait ? - je consacrerai le reste de
ma vie à plaider ma cause.
Jeff
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Georges Gauvin
Fins de mois
Au moment où vous
lirez ces lignes, nous en serons au deux septembre, au moment où débutera
ma fin de mois, une conséquence de ma fin de mois précédente où
elle a débuté vers le dix avec tous ces achats (de l'inévitable rentrée)
que j'ai dû
effectuer, c'est-à-dire à peu
près au moment où les factures des vacances me sont parvenues et
qu'il me fallait équiper (le mot est inexact, mais il dit bien ce que je
veux dire et toutes les mères de famille vous le confirmeront) le
plus-grand-d'années-en-années petit pour l'école. Et par un effet du hasard, c'est au cours
de cette période qu'il nous a fallu renouveler, mon chum et moi, notre hypothèque.
Hasard
? Oui, c'est par un autre hasard que l'automne approche et qu'il
faudra songer à se préparer pour l'hiver (vêtements, pneus à
neige, contrat de déneigement)... sans compter - excusez-moi de vous
le souligner - qu'une fois que tout cela sera réglé, viendront les Fêtes...
À nous deux, mon chum
et moi (excusez si je me répète) - et si j'ajoute à nos revenus ce
que mon ex nous donne pour le p'tit - nous ne sommes pas dans la dèche.
Quelqu'un me disait l'autre jour que nous étions dans l'«above-middle-class»,
pas l'«upper», ni le «lower», mais l'«above».
Jeff pourrait nous
donner des statistiques là-dessus, mais je n'ai aucune idée de ce
que cet «above» peut signifier étant née à Rosemont,
deuxième fille d'une famille de quatre issue de parents qui, si je me rapporte à leur style de
vie et le quartier où nous vivions, devaient être du «lower-middle-class».
Sauf qu'entre ce «lower»
et mon «upper», je trouve inconcevable qu'il restait à mes parents,
à la fin de chaque mois, plus d'argent qu' il m'en
reste au tout début.
Georges
P.-S. : Un gros
merci à Paul qui m'a fait connaître «Blues jeans sur la plage»
du groupe Aut'Chose. - Je n'en reviens pas encore. Surtout à cause de
sa fin : «Les filles de Rosemont en bikini... La naissance de la
tragédie...». - Ce n'était pas de mon
temps, mais sapristi, que des phrases comme celle-là, finissent par
nous frapper.
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Fawzi Malhasti
Morceau choisi
Sympathy for the Devil
Please allow me to introduce myself
I'm a man of wealth and taste
I've been around for a long, long year
Stole many a man's soul to waste
And I was 'round when Jesus Christ
Had his moment of doubt and pain
Made damn sure that Pilate
Washed his hands and sealed his fate
Pleased to meet you
Hope you guess my name
But what's puzzling you
Is the nature of my game
I stuck around St. Petersburg
When I saw it was a time for a change
Killed the czar and his ministers
Anastasia screamed in vain
I rode a tank
Held a general's rank
When the blitzkrieg raged
And the bodies stank
Pleased to meet you
Hope you guess my name
Ah, what's puzzling you
Is the nature of my game
I watched with glee
While your kings and queens
Fought for ten decades
For the gods they made
I shouted out
Who killed the Kennedys?
When after all
It was you and me
Let me please introduce myself
I'm a man of wealth and taste
And I laid traps for troubadours
Who get killed before they reached Bombay
Pleased to meet you
Hope you guessed my name
But what's puzzling you
Is the nature of my game
Pleased to meet you
Hope you guessed my name
But what's confusing you
Is just the nature of my game
Just as every cop is a criminal
And all the sinners saints
As heads is tails
Just call me Lucifer
'Cause I'm in need of some restraint
So if you meet me
Have some courtesy
Have some sympathy, and some taste
Use all your well-learned politesse
Or I'll lay your soul to waste
Pleased to meet you
Hope you guessed my name...
Keith Richards / Mick Jagger
Source : LyricFind
© Abkco Music, Inc.
Fawzi
P.-S. : Pour un
vidéo, voir à : https://www.youtube.com/watch?v=r-dLZYDyhlc
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De notre disc jockey - Paul Dubé
Trois extraits et quelques liens
Ce que dit Simon
aujourd'hui à propos de Proust, Louis-Ferdinand Céline, Joyce et les
imposteurs peut se dire à peu près de tous qui se vantent d'être
des grands amateurs
de musique.
Personnellement,
quand j'entends dire que les Beatles ont révolutionné la musique
populaire,
j'ai tendance à me lever et à m'en aller. Oh, parfois, je demande
sur quelle base on s'appuie pour dire quelque chose d'aussi stupide
pour me faire dire qu' ils ont vendu beaucoup de disques, qu'ils ont
été avant-gardistes ou qu'on les écoute encore aujourd'hui.
Aujourd'hui ? Oui, je
sais, je les entends souvent dans ces restaurants où la musique ne
sert à rien sinon à étouffer les bruits de la vaisselle et les
conversations des clients ou encore rythmer les pas des serveurs. -
Parfois même dans les supermarchés, à la radio, dans les
ascenseurs (où ils ont remplacé Musak). - J'entrevois pour bientôt
- si ce n'est déjà fait - un coffret de tous leurs enregistrements
pour l'nième année de leur formation ou la
mort d'un troisième membre du groupe.
À ceux qui
continuent de les écouter - et qui sont sur le point de remplacer
les inconditionnels d'Elvis - je dis bravo en espérant qu'ils ont
appris les bienfaits humanitaires de la contraception.
Mais il y a pire :
les amateurs de musique dite classique et qui ne jurent que
par Bach, Mozart ou Beethov' (pas Beethoven, mais bien Beethov') «T'sais
qu'il était sourd...» m'a-t-on répété récemment. «Hé
oui, ai-je répondu. Il est évident que, dans ses dernières
compositions, on peut s'en apercevoir par son usage exagéré des
notes graves...» (Chose qu'un connaisseur m'a déjà dite et
qui sert admirablement bien à clore une conversation.). - Ces amateurs ?
Ce sont les mêmes qui vont à l'opéra où, pendant deux heures, au
moins, ils ne sentent pas obligés de démontrer leur ignoranteté (*).
(*) Néologisme
inventé par Simon lui-même.
Et puis, avez-vous
remarqué que les hommes d'affaire en mal de démontrer qu'ils sont
cultivés et qui habitent généralement les grands
pavillons de banlieue, ceux qui se déplacent en Mercedes ou en
Lexus ne lisent pas beaucoup ; qu'il se tiennent, coté culturel,
dans les galeries d'art plutôt que dans bibliothèques ?
C'est sûr que c'est
plus facile de donner son opinion sur une toile que sur un roman :
un roman, il faut le lire...
Aujourd'hui, j'ai
trois extraits à vous faire entendre :
La gigue. Si,
si, une Gigue : cette partie qui suit l'Allemande, la Courante, la
Sarabande, les deux Menuets et l'Anglaise de la troisième des
Suites françaises de Bach (de Jean-Sébastien et non d'Offen') jouée
en premier lieu par Andrei Gavrilov, puis par A. Schiff et tout de suite après par
Glenn Gould dont, je tiens, quand même à vous signaler, dans son
cas, l'extraordinaire main gauche :
Pour Gavrilov,
cliquez ici :
Pour Schiff,
cliquez ici :
Et pour Gould, ici
:
(Ne vous en faites
pas : ces trois extraits durent moins de deux minutes chacun.)
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Et si le coeur vous
en dit, vous pourrez toujours retrouver non seulement ces extraits ,
mais les six suites complètes de cette série aux adresses
suivantes (sur
YouTube) :
Par
András Schiff
Par Tatiana Nikolayeva
Et, si le coeur vous
en dit, au clavecin :
Par Christophe
Rousset
Pour Gravilov, faudra
cliquer sur le lien suivant : YouTube
Et pour Gould, sur le
lien qui suit : YouTube
*
Notes :
Il existe également
à cette suite française, un pendant : une suite
anglaise.
et
Pour nos suggestions et enregistrements précédents, cliquez
ICI.
paul
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Lectures
Note :
Les textes qui suivent - et les précédents - ne doivent pas être considérés comme de véritables critiques au sens de «jugements basés sur les mérites, défauts, qualités et imperfections» des livres, revues ou adaptations cinématographiques qui y sont mentionnés. Ils se veulent surtout être de commentaires, souvent sans rapport direct avec les oeuvres au sujet desquelles les chroniqueurs qui les signent désirent donner leurs opinions, opinions que n'endosse pas nécessairement la direction du Castor™ ni celle de l'Université de Napierville.
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Quelques heures de perdues en compagnie de
Jean Lacouture,
auteur de :
Une adolescence du siècle - Jacques Rivière et la nrf
Folio (Gallimard) - Éditions du seuil, 1994
(Et de deux, même trois autres livres tout aussi captivants)
J'ai eu beau y repenser, mais je n'ai pas réussi à m'expliquer pourquoi, déjà fort occupé par ma famille,
mon travail et mes continuels déplacements, j'ai décidé, comme ça, sans même y réfléchir,
d'acheter, dans une librairie d'occasion de la ville de Québec and with real money,
un livre tel cette brique de 960 pages à propos d'un type
qui a été sans aucun doute important il y a une centaine d'années (il
est né en 1886 et est décédé en 1925), mais qui est
aujourd'hui fort peu connu.
Oh, sans doute pour lire ce qu'il pouvait m'apprendre sur le passage de Marcel
Proust
de Grasset à Gallimard.
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Jacques Rivière fut en effet une des âmes dirigeantes, probablement la plus importante, du
[re]départ de la
nrf (Nouvelle Revue Française), en compagnie de Gide, Ghéon
et Copeau (et d'autres). - De la nouvelle Nouvelle Revue Française car il
n'y fut actif qu'après la Première Grande Guerre lors de sa remise en circulation. -
Il, si l'on en croît ce qu'on soupçonne, aurait été plus ou moins mêlé directement
à la venue de Proust chez Gallimard, mais rien dans cette biographie de
Lacouture a pu m'apprendre d'autre que ce que j'avais déjà lu dans la correspondance générale de Proust (Kolb,
Plon 1976-1993) ou ailleurs
(Painter, Maurois, Tadié....) et même dans une autre brique, de Pierre Assouline celle-là
: Gallimard publié chez Balland en 1984 : 502 pages.
Mais ce n'est pas sur ce ou ces détails que je voudrais attirer votre attention aujourd'hui. C'est sur ce que le Professeur
Steven Pinker du MIT et de l'Université de Harvard, appelle l'«académisme» ou cette langue que seuls certains spécialistes réussissent à
comprendre.
En voici deux exemples tirées d'un troisième livre, mais encore plus
inutile celui-là :
«Encore reste-t-il à se demander, en particulier quand il s'agit de romans, s'il ne convient pas de prendre en considération, et à quelle place, le pluralisme, si fortement dégagé par Mikhaïl
Bakhtine (voir P.-S. à la fin), des données linguistiques et des points de vue qui en sont inséparables, sous l'apparence homogénéité de la langue.»
et
«Mais, à tout moment, l'équilibre se rompt aux dépends du discours adverse, et le narrateur ne réaffirme son choix qu'in extremis, par un mot d'argot, au terme d'un segment de ce discours adverse suffisamment long, et placé de telle sorte que la question se posait au lecteur de savoir si le narrateur ne le faisait pas sien.»
Elles sont toutes les deux tirées d'une mini-brique de 476 pages d'Henri Godard intitulé «Poétique de Céline» paru chez Gallimard
(toujours) en 1985 sur la couverture duquel on peut lire :
«Sur les possibilités du plurivocalisme dans le roman, sur les éléments constitutifs et sur les fonctions de la voix narratrice, sur le rapport du roman...»
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Bref : du somnifère en capsules imprimées.
*
Ceci :
Vous vous souvenez de ce que Simon a déjà
sur le Journal des Goncourt ? Que c'était un livre illisible.
Illisible parce qu'il contenait trop de détails, de références et
d'allusions devenus, avec le temps, incompréhensibles, mais surtout
trop de personnage et qu'après quelques pages, il fallait avoir
consulter douze dictionnaires pour savoir qui pouvaient être X, Y, Z rencontrés chez la Princesse
A ou le Baron B au cours d'une soirée où il y avait
vingt autres invités.
À cause de ceci :
Le nombres de personnes mentionnées dans
l'index du le livre de Lacouture
sur Rivière ? Cinq cent vingt-cinq (525). Certains sont mentionnés
plusieurs fois sauf un, mais sans doute plusieurs autres :
Cliquez sur les images pour agrandir
:
Page 653 et page 654
Comme vous pouvez le constater, dans l'édition que j'ai
eu en main de cet Adolescence du siècle, le nom de Marcel Proust n'est,
en effet, pas mentionné dans son index. Une erreur d'imprimerie sans aucun doute puisque de la page 953 à la page 954 on saute de
Proust, Adrien, docteur (le père de Marcel)... à Quièvremont, Yvonne
de...
Le livre datant de 1994, j'imagine qu'on
a dû corriger depuis. Alors, j'ai feuilleté et feuilleté celui que
j'ai eu en main, puis abandonné.
À noter que dans le Gallimard d'Assouline sur Gallimard,
Proust est cité 31 fois. Un nom, comme ça, parmi les quatre cent soixante quinze
(475) que son index contient.
Quant à la d'Henri Godard «Poétique de Céline»...
Bref, c'est ce qu'on appelle perdre son
temps.
Vous savez ce que dit Simon dans ces
moments-là : «Quand on n'est pas intelligent et désorganisé...»
Copernique
P.-S. : Mikhaïl Bakhtine ? - Il fut (1895-1975) un historien et théoricien russe de la littérature qui s'est intéressé à la psychanalyse, à l'esthétique et à l'éthique et a été un précurseur de la sociolinguistique. [...] Il a, en particulier, su développer les concepts de dialogisme et de polyphonie dans le champ littéraire.
- J'ai pensé que vous pourriez être ravi de l'apprendre.
*
Ajouts de Simon (sur ce qui précède)
Vous avez dit mon cher Copernique «académisme»
?
De la petite bière, comparé au fioriturisme.
Comme vous pouvez vous en douter , le fioriturisme
(ou affèterie) consiste à agrémenter un texte pour l'embellir. - Jean
Lorrain (avec qui Proust s'est battu en duel [sic]) en était un
partisan au début du siècle dernier. - Ce Lorrain d'ailleurs, fut
partisan de bien des choses, mais passons. - Plus près de nous, il
faut se rappeler de Philippe «Phil» Laframboise qui fut
concepteur, scripteur, auteur, journaliste et dont je me souviens
surtout des textes qu'il écrivait, dans les années 60, 70 et 80, au
dos des pochettes de 33t vantant les mérites de certains interprètes
au point où l'on se demandait si on n'était pas loin de découvrir
les plus grands chanteurs ou chanteuses de tous les temps. - Lui et
Guy Godin n'avaient pas leurs pareils dans les années 80. - Faudra
reparler des deux un de ces jours. Mais, j'ai trouvé pire récemment.
Faites-moi plaisir et lisez-en un
exemple qui suit.
- C'est très court car ça fait partie du début d'une
plaquette de 58 pages (largement espacée).
Après je vous dirai où j'ai déniché
ce chef-d'oeuvre et de qui ou de quoi au juste, il en est
l'objet.
«Je me rappelle. C'était un univers d'étincellements et d'éveils, un univers de cristal, de prismes, d'aigrettes transparentes. Il se déployait dans une mythologie inédite où
le créateur s'appelait l'Ensemblier, le dieu malin Arthur, le tentateur l'Abalstitiel. Il se parait de mots inventés : Glaia pour le sentiment qu'on éprouve quand les feuilles rouges du manguier sont retournées par le vent et deviennent blanches,Youli pour la faim et le sommeil, Aziel pour la caresse des ailes d'oiseau et pour l'amour. Les sources s'y trouvaient à leur jaillissement et vous inondaient d'une eau qui n'avait touché que l'eau. La pluie n'y mouillait pas. La lune y montait aussi haut que peut monter la lune. Les pas y étaient plus rapides que dans la vie, les choses plus agiles et plus nettes. Les chevaux y avaient des éclats d'or au poitrail, et les femmes des paillettes d'or dans les yeux. Elles y ressemblaient à la Victoire de Samothrace avec sa tête, à la Vénus de Milo avec ses bras. Elles s'y montraient avec des attributs de péri, des iris d'elfe, des nez d'archange, et leur sourire était uni par tant de pourpre à leur pensée que leur éclat faisait paraître meurtri le jour lui-même. Elles s'avançaient vers le monde en figures de proue. Chacun de leurs gestes déposait un diamant, et sur les nappes, au lieu d'égrener des miettes, elles semaient des barrettes, des boîtes en or, des perles. Les bijoux avaient l'air jaillis de leurs personnes. Quand elles faisaient naufrage, elles usaient leurs jours à se poncer les jambes et à les frotter d'une poudre de nacre qui les rendait d'argent. Quand elles n'avaient plus, au-dessus de leur nudité, qu'un grand chapeau, elles étaient pareilles aux longues femmes rosées de Cranach. Toutes auraient pu dire «J'ai quinze ans. Et je suis née depuis des siècles, et je ne mourrai jamais. »
Les amants s'étreignaient au point du jour, dans tout ce que le soleil peut offrir de plus rayonnant. Les îles désertes étaient des Eldorados, pleins d'oiseaux rouges, de parfums, d'arbres inconnus couverts d'aliments-rébus. Les morts même, plutôt que des réminiscences et des visions avaient conscience de miroitements, de fragments de lueurs. Tout paraissait possible : marcher sur l'eau, sauter les gouffres, chanter au milieu des lacs ou du haut des cascades. Et lancés au-dessus des forêts comme des torches échangées par des jongleurs, des oiseaux de paradis survolaient l'oeuvre.»
De quel livre cela a-t-il été tiré et à propos de qui ?
De Marie-Jeanne Durry, à propos de
Giraudoux : «L'univers de Giraudoux» publié au Mercure de
France, en 1961.
Qui fut Marie-Jeanne Durry ? -
Une poétesse française (1901-1980) et professeur de -
quoi d'autre ? - littérature française à la Faculté des lettres de Paris puis
directrice de l'École normale supérieure de jeunes filles de 1946 à
1974...
Simon
***
Guillaume Musso - La vie secrète
des écrivains
Calmann-Lévy, 2019
(Une bonne amie à moi - une très bonne amie; une
femme que j'adore - qui m'a aidé à retracer la référence au texte
qui précède et dont j'avais oublié l'auteur, fut fort surprise
d'apprendre que j'étais à la recherche de ce dernier livre de
Musso. - Je ne me souviens plus exactement de ce qu'elle m'a
dit, mais c'était dans le genre : «Quoi ? Mais c'est [un
mot que je n'arrive pas à me souvenir] !» - «Tiens,
que je me suis dit, elle commence à savoir ce que je lis !»)
Notre fidèle lecteur, celui qui habite en face du Parc Lafontaine nous
écrivait récemment pour nous signaler ce livre, le dernier de l'écrivain qui serait
en ce moment le plus lu en France.
- «Voilà, que je me suis dis [je me parle souvent
tout seul], un autre écrivain que je n'aurai pas le temps de lire...»
Sauf que dans son message, il m'a cité abondamment divers écrivains
réels ou fictifs à propos de l'acte d'écrire.
Permettez que j'en cite quelques uns :
Nathan Fawles : «Comme Margaret Atwood, je pense que vouloir rencontrer un écrivain parce qu'on aime son livre, c'est comme vouloir rencontrer un canard parce qu'on aime le foie gras
[...] Parce que l'existence d'un écrivain est le truc le moins glamour du monde. Tu mènes une vie
de zombie, solitaire et coupée des autres. Tu restes toute la journée en pyjama à t'abîmer les yeux
devant un écran en bouffant de la pizza froide et en parlant à des personnages imaginaires qui finissent par te rendre fou. Tu passes tes nuits à suer sang et eau pour torcher une phrase que les trois quarts de tes maigres lecteurs ne remarqueront même pas.»
Umberto Eco : «Je n'appartiens pas à la clique des mauvais écrivains qui prétendent n'écrire que pour eux-mêmes. Tout ce qu'un auteur écrit pour lui-même, ce sont des listes de courses, qu'il peut jeter ses achats terminés. Tout le reste [...]
sont des messages adressés à quelqu'un d'autre.»
Milan Kundera : «1) L'intervieweur vous pose des questions intéressantes pour lui, sans intérêt pour vous. 2) De vos réponses, il n'utilise que celles qui lui conviennent. 3) Il les traduit dans son vocabulaire, dans sa façon de penser.»
Eugène Ionesco : «Un écrivain n'est jamais en vacances. Pour un écrivain, la vie consiste soit à écrire, soit à penser à écrire.»
Marcel Proust : «Une personne est une ombre où nous ne pouvons jamais pénétrer, une ombre où nous pouvons tour à tour imaginer, avec autant de vraisemblance, que brillent la haine et l'amour.»
John Irving : «Qu'est-ce qu'un bon roman ? Vous créez des personnages qui suscitent l'amour et la sympathie de vos lecteurs. Puis vous tuez ces personnages. Et vous blessez votre lecteur. Alors, il se souviendra toujours de votre roman.»
Et même :
William Shakespeare : «L'enfer est vide, tous les démons sont ici.»
Je serais tenté de débuter ma réponse à toutes ces citations par un «Comme tout le monde, je suis, depuis Pivot, habitué à entendre des commentaires comme ceux-là...», mais j'ai décidé que ce serait, comme on me le dit trop souvent, condescendant de ma part parce ce que, défilant à mon tour d'autres citations, je ne ferais que souligner encore une fois non seulement mes préjugés,
mes parti-pris et surtout mon ignoranteté ou, à tout le moins, non seulement la petitesse de mon univers, mais - passez-moi l'expression - son herméticité(*).
(*) Dans le sens de «qui est fermé de manière à empêcher tout échange... qui est parfaitement clos... exclusif... si spécialisé qu'il est presque du domaine de l'anachorétisme». (Cette explication en étant la preuve.)
Alors, mettons tout cela de côté et laissez-moi mentionner une seule question que, malheureusement, je n'ai jamais entendue et qui aurait pu,
qui aurait dû faire partie de ces innombrables interviews qu'ont accordé des centaines d'écrivains et qui, ces interviews, font partie du «monde littéraire» depuis plusieurs années. (En cela, je me réfère non seulement aux émissions de
Bernard Pivot, mais jusqu'aux entretiens de Gide avec Jean
Amrouche, de Paul Léautaud avec Jean Mallet et même de Julien Green avec
Marcel Jullian, mentionnés ici il n'y a pas si longtemps.)
Cette question, la voici :
«Si l'humanité disparaissait et que vous vous retrouviez seul au monde, le dernier survivant d'une espèce qui s'éteindra avec vous, continueriez-vous à écrire ?»
Je ne reciterai pas encore une
fois la célèbre remarque de Borges («Comme Coleridge, j'ai toujours su, dès mon enfance, que mon destin serait littéraire. Je ne savais pas alors que
- comme le pensait Emily Dickenson - la publication
n'est pas la partie essentielle du destin d'un écrivain.»),
car je voudrais
répondre à cette question ceci :
Je ne me considère pas comme un écrivain - certainement pas de ceux qui ne songent qu'à une chose,
soit publier- sauf que si je considère ce que j'écris avec une régularité qui frise la
toquade, je ne
saurai pas m'arrêter et je crois que dans cette réponse je résume
la raison fondamentale pour laquelle j'écris : pour mettre de
l'ordre dans mes pensées.
Est-ce qu'il pourrait en avoir
d'autres ? Oui, mais pour cela, il faut que l'humanité ne cesse pas
d'exister :
La gloire, l'argent, pour les générations qui suivent (en espérant
qu'elles seront moins stupides que la nôtre) et, peut-être même,
pour démontrer à quel point on est intelligent.
Vous savez ce que je pense des
auteurs «intelligents» ? La même chose que je pense des comédiens
: plus ils sont inintelligents, moins ils sont drôles. Dans ses
derniers films, Chaplin était moins drôle que n'importe quelles
des deux
bobines de Laurel & Hardy...
Et puis, écrire quand il n'y aura plus de lecteurs... Pourquoi pas ?
Je ne crois pas
que celui qui a «peint» la main qui suit pensait à impressionner
ceux que nous sommes, vingt mille ans après :
Grotte Chauvet
Vallon-Pont-d'Arc,
département de l'Ardèche,
région Auvergne-Rhône-Alpes
Simon
P.-S. : Et Musso ? - PLC : Pas
Les Chars.... - Le plus gros vendeur en France, hein ? Décidément,
je ne mourrai pas riche.
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L'extrait du mois
Les Henrouille
Coincés entre les bâtisses, moisissent ainsi quelques pavillons résistants, quatre pièces avec un gros poêle dans le couloir d’en bas ; on l’allume à peine, c’est vrai, le feu, à cause de l’économie. Il fume dans l’humidité. C’est des pavillons de rentiers, ceux qui restent. Dès qu’on entre chez eux on tousse à cause de la fumée. C’est pas des rentiers riches qui sont restés par là, non, surtout les Henrouille où on m’envoyait. Mais tout de même c’était des gens qui possédaient un petit quelque chose.
En entrant, ça sentait chez les Henrouille, en plus de la fumée, les cabinets et le ragoût. Leur pavillon venait de finir d’être payé. Ça leur représentait cinquante bonnes années d’économies. Dès qu’on entrait chez eux et qu’on les voyait on se demandait ce qu’ils avaient tous les deux. Eh bien, ce qu’ils avaient les Henrouille de pas naturel, c’est de ne jamais avoir dépensé pendant cinquante ans un seul sou à eux deux sans l’avoir regretté. C’est avec leur chair et leur esprit qu’ils avaient acquis leur maison, tel l’escargot. Mais lui l’escargot fait ça sans s’en douter.
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Les Henrouille eux, n’en revenaient pas d’avoir passé à travers la vie rien que pour avoir une maison et comme des gens qu’on vient de désemmurer ça les étonnait. Ils doivent faire une drôle de tête les gens quand on les extirpe des oubliettes.
Les Henrouille, dès avant leur mariage, ils y pensaient déjà à s’acheter une maison. Séparément d’abord, et puis après, ensemble. Ils s’étaient refusé de penser à autre chose pendant un demi-siècle et quand la vie les avait forcés à penser à autre chose, à la guerre par exemple, et surtout à leur fils, ça les avait rendus tout à fait malades.
Quand ils avaient emménagé dans leur pavillon, jeunes mariés, avec déjà leurs dix ans d’économie chacun, il n’était pas tout à fait terminé. Il était encore situé au milieu des champs le pavillon. Pour y parvenir, l’hiver, fallait prendre ses sabots, on les laissait chez le fruitier, du coin de la Révolte en partant le matin au boulot, à six heures, à la station du tramway à cheval, pour Paris, à trois kilomètres de là pour deux sous.
Ça représente une belle santé pour y tenir toute une vie à un régime pareil. Leur portrait était au-dessus du lit, au premier étage, pris le jour de
la noce. Elle était payée aussi leur chambre à
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coucher, les meubles, et même depuis longtemps. Toutes les factures acquittées depuis dix, vingt, quarante ans sont du reste épinglées ensemble, dans le tiroir d’en haut de la commode et le livre des comptes complètement à jour est en bas dans la salle à manger où on ne mange jamais.
Henrouille vous montrera tout ça si vous voulez. Le samedi, c’est lui qui balance les comptes dans la salle à manger. Eux, ils ont toujours mangé dans la cuisine.
J’ai appris tout ça, peu à peu, par eux et puis par d’autres, et puis par la tante de Bébert. Quand je les ai eu mieux connus, ils m’ont raconté eux-mêmes leur grande peur, celle de toute leur vie, celle que leur fils, l’unique, lancé dans le commerce, ne fasse de mauvaises affaires.
Pendant trente ans ça les avait réveillés presque chaque nuit, un peu ou beaucoup cette sale pensée-là. Établi dans les plumes ce garçon Songez un peu si on en a eu des crises dans les plumes depuis trente ans ! Y a peut être pas eu un métier plus mauvais que la plume, plus incertain.
On connaît des affaires qui sont si mauvaises qu’on ne songe même
pas à emprunter de l’argent pour les renflouer, mais il y en a des
autres au sujet desquelles il est toujours plus ou moins question
d’emprunts. Quand ils y pensaient à un emprunt comme ça, même
encore à présent maison payée et tout, ils se levaient de leurs
chaises les Henrouille et se regardaient en rougissant. Que feraient-ils
eux dans un cas comme celui-ci ? Ils refuseraient.
Ils avaient décidé de tout temps de refuser à n’importe quel
emprunt... Pour les principes, pour lui garder un pécule, un héritage
et une maison à leur fils, le Patrimoine. C’est comme ça qu’ils
raisonnaient. Un garçon sérieux certes, leur fils, mais dans les
affaires, on peut se trouver entraîné...
[...]
Lui, le père Henrouille, il avait été petit
clerc chez un notaire au boulevard Sébastopol pendant cinquante ans.
Aussi, en connaissait-il des histoires de dilapidation de fortunes !
Il m’en a même raconté des fameuses. Celle de son propre père
d’abord, c’est même à cause de sa faillite à son propre père
qu’il n’avait pas pu se lancer dans le professorat Henrouille, son
bachot et qu’il avait dû se placer tout de suite dans les écritures.
On s’en souvient de ces choses-là. Enfin, leur pavillon payé, bien
possédé et tout, plus un sou de dettes, ils n’avaient plus à s’en
faire tous les deux du côté de la sécurité !
C’était dans leur soixante sixième année...
Louis-Ferdinand Céline - Voyage au bout de la nuit
Note : La photo ci-dessus est tiré de l'édition
illustrée par Tardi du Voyage au bout de la nuit paru chez
Gallimard (Futuropolis) en 1988.
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Le courrier
M. Honoré de la
Passementerie-Mercier, Tansonville, France
«Photius, oh Photius ! Ton nom aurait dû se lire Fastidius !»
est tiré de : «Quelques regards sur la pensée parallèle des moines contestataires de Moravie lors du Grand Schisme d'Orient.» (A. Talon et M. Regnier - Dargaud, 1964).
- Voir à Photius.
Mme Béatrice de
Saint-Amand, Pointe-aux-Trembles, Québec
Certaines choses demeurent
incompréhensibles sans explications préalables : les échecs, certains
jeux de cartes (à deux et même à quatre comme le bridge), le criquet,
René Char (même traduit en français), la politique étrangère de
Trump, certaines croyances polynésiennes et la messe.
Monsieur James Watt,
Mississauga, Ontario
La distance entre Montréal
et Lapocatière (Qc) est de 916 kilomètres. Si vous vous arrêtez en
route à Montréal, elle sera de 1 007 kilomètres. La différence entre
les deux (91 kilomètres) sera dû aux détours qu'il vous faudra
emprunter si vous passez par l'échangeur Turcot ou les échangeurs Décarie
et Anjou. - Alors là, il faudra songer à 123 kilomètres, surtout au
cours des week-ends. - Bien entendu, vous pouvez, peu avant
Dorion-Vaudreuil, emprunter l'autoroute 30, mais il faudra vous méfiez
des embouteillages entre la 10 et la 20, surtout près du Dix-Trente. -
L'autre solution consiste à, Coteau-du-Lac, en celle d'emprunter la 201
en direction de Hudson, prendre le traversier (Oka) et de là, via la 344,
rejoindre la 640 (et la 40 à Repentigny), vous diriger vers Québec où,
en empruntant la 540 (et la 73), vous rejoindrez à nouveau la 40 via le
pont Pierre-Laporte.
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Dédicace
Cette
édition du Castor est dédiée à :
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Clara
Schumann
(1819-1896)
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Le mot de la
fin
«Le vrai bonheur consiste à s'endormir le soir en ayant hâte de se réveiller
pour poursuivre son activité de la veille.»
- Shelby Foote, en
interview, en 1996.
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Addenda
Ajouts - deuxième édition
À propos des Parisiens qui ne disent jamais : «Je
ne sais pas»
(Simon Popp - Proust, Louis-Ferdinand Céline, Joyce et les
imposteurs)
La réputation des Parisiens (ou des Londoniens ou des
habitants de n'importe quelle grande ville) se rapporte souvent à des
clichés de ce genre.
Ainsi, si le climat de Londres est souvent dit froid
et humide alors que celui de Paris... :
La pluie annuelle moyenne, à Paris, est de 637 mm.
Celle de Londres, 621 mm.
La température annuelle moyenne à Paris est de 11,3 C. Celle de
Londres est de 11.1 C.
À propos de Foote et de Proust
(Même chronique)
Re : «On apprend toujours quelque chose en relisant Proust. Quand on sait où il s'en va, c'est une véritable et continuelle découverte de noter comment il s'est pris pour nous y amener...»
Il en est de même du sourire de la Mona Lisa ou de la technique de vermeer de Delft. On voit l'effet, mais la méthode nous reste pantois.
À propos de Céline
(Idem)
Les faux connaisseurs de Céline sont toujours fiers de mentionner qu'il aimait les danseuses, qu'il en a, en fait, mariée une, en 1943, Lucette, qui vécu avec lui jusqu'à sa mort en 1961... et qu'elle était toujours vivante... à 107 ans.
Mois dernier
Mary Wollstonecraft ?
Mary Wollstonecraft , née en 1759 et
décédée en 1797, est surtout connue pour avoir écrit le roman
Frankenstein en 1818, mais elle fut beaucoup plus.
Voir le lien suivant : https://fr.wikipedia.org/wiki/Mary_Shelley
La direction
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Et, finalement, en exclusivité au Bijou :
(Pour un temps limité)
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Autres sites à
consulter
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Webmestre : France L'Heureux
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Webmestre : Éric Lortie
Webmestres : Paul Dubé et Jacques Marchioro
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Notes et autres avis
Clauses et conventions :
Le Castor™ de
Napierville est le fruit de plusieurs interventions de la part d'une
multitude d'intervenants :
-
En tête, son
programmeur qui a pour tâche de transformer son contenu en
fichiers HTML de telle sorte à ce qu'il puisse être diffusé en
textes lisibles sur Internet
-
En arrière-plan,
son éditeur qui réunit dans un ordre pré-établi les textes et
images qui en font parti
-
Les chroniqueurs,
chercheurs, concepteurs qui en rédigent chaque numéro.
-
Viennent ensuite
les correcteurs, vérificateurs, inspecteurs et surveillants qui
en assurent la qualité.
mais d'abord et avant
tout :
Autres informations,
conditions et utilisation
Le Castor™ de
Napierville est publié une fois par mois, le premier lundi de chaque
mois.
En haut, à gauche, à côté
de la date, est indiqué le numéro de sa version ou de son édition. Le
numéro1.0 indique sa première et suivent, selon les correctifs, ajouts
ou autres modifications, les numéros 1.2, 1.3, 1.4.... 2.0, 2.1, 2.2
etc. - La version 3.0 indique qu'il s'agit de son édition finale qui, généralement,
coïncide avec sa version destinée au marché américain, celle qui
paraît en principe avant ou le jeudi suivant sa première édtion.
Si le Castor™ de
Napierville a un siège social, il n'a pas de salle de rédaction et
compte tenu de la situation géographique de chacun de ses
collaborateurs, tout le ci-dessus processus se déroule in auditorium
c'est-à-dire en présence du public via l'Internet.
Nous prions nos lecteurs,
etc.
Historique :
Fondé en 1900 par le Grand Marshall, le CASTOR DE NAPIERVILLE fut, à l'origine, un hebdomadaire et vespéral organe créé pour la défense des intérêts de l'Université de Napierville et de son quartier. - Il est, depuis le 30 septembre 2002, publié sous le présent électronique format afin de tenir la fine et intelligente masse de ses internautes lecteurs au courant des dernières nouvelles concernant cette communauté d'esprit et de fait qu'est devenu au fil des années le site de l'UdeNap, le seul, unique et officiel site de l'Université de Napierville.
De cet hebdomadaire publié sur les électroniques presses de la Vatfair-Fair Broadcasting Corporation grâce à une subvention du Ministère des Arts et de la Culture du Caraguay, il est tiré, le premier lundi de chaque mois, sept exemplaires numérotés de I à VII, sur papier alfa cellunaf et sur offset ivoire des papeteries de la Gazette de Saint-Romuald-d'Etchemin et trois exemplaires, numéroté de 1 à 3, sur offset de luxe des papeteries Bontemps constituant l'édition originale, plus trois exemplaires de luxe (quadrichromes) réservés au Professeur Marshall, à Madame France DesRoches et à Madame Jean-Claude Briallis, les deux du Mensuel Varois Illustré.
Autres informations :
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