Les billets de Madame George Gauvin

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No. 061 à 070
(Du 6 août 2018 au 3 juin 2019)
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070-2019-06-03
Printemps...
Dans le métro, hier, un
bonhomme est entré vêtu d'un pardessus d'hiver ; d'un véritable
«coat des neiges», comme dit Simon. Avec une tuque sur
la tête et des gants. Un peu plus, il aurait été chaussé
d'une paire de bottes, mais il ne portait définitivement pas des
sandales.
Tous les passagers faisaient
semblant de ne pas le regarder, mais j'en sais, comme moi, qui se
sont dit qu'avec le plus cinq qu'il faisait quand je suis sortie
de la maison, ils auraient dû s'habiller comme lui.
Je ne suis pas la mode. Ni
aucune de mes collègues au bureau. Même ma mère s'est toujours
défendue de porter le mauve du jour ou le tailleur du dernier
cri. Mais pour les périodes de l'année, nous sommes tous, y
compris les hommes, des idiots. Vient le printemps et nous
retirons de nos placards tout ce qui pourrait être utile pour
encore quelques jours. - Quelques jours ? - Des semaines, cette
année. - L'été approche et si j'ai vue ma voisine sortir en «shorts»
deux fois depuis le début d'avril, je ne me souviens pas d'une
seul journée où un chandail n'était pas un luxe. - Faut dire
qu'elle...
Ce sont des choses comme
celles-là qui me font penser que j'ai hâte de vieillir pour
avoir assez de front (de personnalité ?) pour me vêtir
convenablement.
D'ailleurs, j'ai déjà commencé
: je ne porte plus de petites culottes, que des
confortables. Après tout je ne sort plus pour aller trouver MON
prince charmant. Et si j'en trouve un, je suis certaine que ses
sous-vêtements seront en état de décomposition.
George
*
069-2019-05-06
Tofu, glucides, protéines, gras saturés...
Paraît que le guide
alimentaire canadien a été récemment amendé ; que le précédent
avait été trop influencé par le producteurs laitiers. Paraît
que le petit déjeuner, le matin, a une certaine importance, mais
que cette importance a fortement été exagérée dans le passé
par les distributeurs de céréales en boites, notamment les
terribles frères Kellog, des adventistes du septième jour. Paraît
qu'il a du bon et du mauvais cholestérol ; qu'il faut manger des
légumes et des fruits en abondance ; que les aliments protéinés
sont meilleurs pour la santé que les viandes rouges ; que le
pain brun a meilleur goût que le pain blanc ; que le quinoa est
un aliment miracle et que le tofu, surtout celui coagulé avec du
chlorure de magnésium, pourrait, sous certaines conditions, nous
protéger contre l'hyperchylomicronémie, la peste bubonique et, sans doute, enfin :
je le suppose, l'épanchement hélicoïdal de la paroi
strangulaire du corps thyroïde.
Question : est-ce que vous vous
savez comment se prononce «graines de chia» ? Car, ce
serait, ça aussi, une source de protéine végétale de haute
qualité. On me dit que c'est délicieux avec avec du yogourt -
pardon : du yaourt -, le grec, naturellement. - Comme je n'en
trouve jamais chez mon épicier, je n'ose pas lui demander s'il
en vend... - Je sais : si je dis «shia», on va me dire
que ça se prononce «kia» et si je dis «kia»...
- On m'a déjà fait le coup.

Et puis y'a moi vis-à-vis tout
ça. Moi qui se veut parfaite en tout : au travail, en amour, en
mère de famille, au gym, en cuisine, dans l'art de recevoir et
parfaite compagne en société, à pied, à bicyclette, en
voiture. - Qu'ajoutez de plus ? Ben, y'a
la texture de ma peau, mon teint, mon tour de taille, mon poids,
mes ongles et puis ces rides qui se développent autour de mes lèvres
et... ma diction. Très importante, ma diction. Sans compter que,
quand même, je dois être un peu renseignée sur ce qui se passe
dans le monde et être capable de feindre une certain pitié pour
ces enfants qu'on fait travailler dans les usines en Asie ou qui
meurent de faim en Afrique. - Et j'allais oublier le recyclage et
le compostage.
Tout un menu !
Et si je me mettais à peindre
comme ma deuxième chum de fille ? Paraît qu'elle va exposer ses
toiles dans un supermarché bientôt. Ça me ferait des sous de
plus. D'autant plus que le macramé est passé de mode. Puis y'a
des cours de yoga qu'on annonce au centre culturel de mon
quartier.
D'abord mon alimentation. C'est
la base à ce qu'on m'a dit. Ce qui me fait penser : faut que
j'achète du thé vert... à moins que je me mette aux tisanes. -
J'vais m'renseigner auprès de la grande Léa, dans le service de
la comptabilité. Paraît que...
George
***
068-2019-04-01
Boss et boss
Il est onze heures. C'est vendredi. Le vendredi vingt-deux mars de l'an 2019. J'avais prévu aller en ville aujourd'hui. Mais on annonce de la pluie mêlée de neige et de
dieu-sait-quoi. - Comme
dit Monsieur Popp : «Quand nous est tombé du ciel de la pluie, de la neige, de la grêle et du verglas, qu'est-ce qui peut encore nous
tomber dessus ?»
Sauf qu' il ajoute toujours : «Oui, mais avouez que c'est plutôt
rare.» Alors j'ai décidé de rester à la maison.
C'est malheureux car il est rare que j'ai une journée, comme ça, en plein
milieu de la semaine où je n'ai pas à me rendre au travail et pas le petit à m'occuper de.
J'ai congé aujourd'hui.
On est à repeindre la section où se trouve mon bureau. Aujourd'hui, demain et après-demain. Sauf que demain, c'est samedi et après-demain, dimanche et que je n'y serais pas allé de toutes façons.
C'est qu'on est à redécorer mon bureau, celui de mon adjointe et celui de mon boss qui, lui, est à Toronto, voir son boss dont le boss est le boss des boss et qui dit tout le temps qu'il a plusieurs boss : les propriétaires de la shop.
- Some boss : un bonhomme
en fauteuil roulant et qu'on voit jamais et les deux veuves de ses ex-associés, les fondateurs ou premiers boss. Ce qui fait qu'on a ben des boss : des boss, des sous-boss, des mini-boss et même des boss
d'employés qu'on ne voit jamais : ceux qui s'occupent
de vider les corbeilles la nuit et qui se rapportent aux propriétaires de
l'immeuble, leur boss qui a délégué sa bosserie à un sous
mais également un sur-boss.

Mais il ne faut pas que je m'oublie pas parce que je suis une boss, moi aussi : la boss de mon adjointe, la boss de notre secrétaire qui, elle, a une autre boss : celle qui s'occupe des
employés subalternes et qui se rapporte au boss du bureau qui est également le boss des employés en charge du classement, des archives et des photocopieurs.
Ben des boss.
Il est onze heures. C'est vendredi. Le vendredi vingt-deux mars de l'an
2019.
Tiens, je vais appeler ma mère.
George
***
067-2019-03-04
On dit...
«On dit
Que j'aime les aigrettes
Les plum's et les toilettes
C'est vrai !
On dit
Que j'ai la voix qui traîne
En chantant mes rengaines
C'est vrai !
On dit
Que j'ai de grandes quenottes
Que j'ai que trois notes
C'est vrai !
Lorsque ça mont'
trop haut, moi je
m'arrête
Et d'ailleurs on n'est pas
Ici à l'opéra
On dit
Que j'ai l'nez en trompette
Mais j's'rai pas Mistinguett
Si j'n'étais pas comm' ça !»
(Chanson créée par
Mistinguett dans la revue «Folies en folies» aux Folies
Bergère en décembre 1933 - Paroles d'Albert Willemetz - Musique
de Casimir Oberfeld - Salabert, éditeur - Merci Paul !)
*
On dit...
On dit...
Qu'une femme de mon âge
Ne pense pas comme moi...
On dit...
Qu'une femme de mon âge
N'écrit pas comme moi
On dit...
Qu'une femme de mon âge
N'a jamais eu d'amants
On dit...
Qu'une femme de mon âge
Ne parle pas de ça !
Mais...
J's'rais pas George Gauvin
Si j'en parlais pas !
George
***
066-2019-02-04
Autour d'une paire de jeans
J'ai ri à gorge «d'employé»
(Merci Simon !) lors de la dernière réunion des chroniqueurs du Castor™
quand j'ai entendu Monsieur Popp (qu'est-ce que c'est que cette
idée de se tutoyer entre nous ? Monsieur Popp a deux fois mon âge,
Monsieur Pérec presque trois et l'on voudrait que je les appelle
Simon et Hermy !) - m'enfin... ; quand j'ai entendu Monsieur Popp
parler de ses abonnements aux bibliothèque
de Montréal, de Westmount, de l'Université McGill, de
l'Université de Napierville (forcément), mais aussi à la
Grande Bibliothèque du Québec et, depuis le déménagement du
siège social du Castor™ à Les Coteaux, à celle de la
ville de Valleyfield.... - «Tout dépend de ce que je veux lire.»
a-t-il dit.
Le lendemain, j'en ai parlé à ma
chum de fille dont le chum connaît une fille qui travaille dans une
bibliothèque en banlieue de Montréal et c'est là que j'ai appris
que tout dépendait de la clientèle de chaque biblio et de son mandat.
À la Grande Bibliothèque, par exemple, on est considéré comme un dépositaire
de la «culture» québécoise et qu'en conséquence, tous les livres -
et en particulier ceux publiés au Québec - doivent y être conservés
à perpétuité tandis qu'une bibliothèque comme celle de Westmount
peut, sans problème, se spécialiser plus en livres anglophones par
rapport aux francophones. Et puis y a toujours les questions de l'espace
disponible, des budgets, des utilisateurs qui, à certains endroits, ont
des besoins spécifiques : livres techniques, best-sellers, livres
anciens, etc. - Et, je me suis laissé dire que... quand le grand patron
d'une bibliothèque «y fou' le bordel» et s'en va, ben... c'est le «free-for-all»
!
«Trouver Tacite en latin,
disait Monsieur Popp, est un casse-tête et si, il y a une vingtaine
d'années, je pouvais trouver à la bibliothèque de Verdun (une
sixième !) la plupart des livres publiés sur Proust avant 1950,
ben... aujourd'hui, ils n'y sont plus. On les a élagués...»
Plus tard, j'ai appris qu'ayant absorbé
la bibliothèque de la ville et du séminaire de Valleyfield et celle rattachée
au CEGEP local a cru intelligent de garder les éditions des
Belles-Lettres de Paris, la seule qui, encore aujourd'hui, publie à peu
près toute la littérature gréco-latine dans des éditions bilingues,
mais cela m'éloigne de l'affaire dont à laquelle je voulais vous
parler de, aujourd'hui (une expression que je n'oublierai jamais !)
; les jeans.

Un détour :
Y'a pas longtemps, mon chum enfile une
chemise que je ne lui avait jamais vue sur le dos. Belle coupe, belle
couleur, bref : une belle chemise. «Où t'as pris ça ?» - «Chez
W***...10 $» qu'il m'a répondu. DIX DOLLARS ! La même, chez La
Baie, en vente, m'en aurait coûté au moins cinquante...
Exploitées, nous sommes, nous les
femmes ? - Oui, mais pas tout le temps. C'est sûr que les rasoirs roses
de chez BIC coûte plus cher que les mêmes, bleus, destinés aux
hommes, mais cela n'est pas si flagrant dans le domaine des jupes et des
blouses.
Jeune, quand j'avais un autre corps
(me semble que c'était y'a pas si longtemps,,,) je me souviens m'être
trouvée bien intelligente de me procurer mes blouses blanches dans le
rayon des garçons sauf que pour une paire de jeans, je n'ai jamais eu le
choix. Il fallait et il faut toujours que j'en essaye dix avant d'en
trouver une qui me «fait». - Là encore, c'est ma chum de fille qui
est déjà sorti avec un gars qui travaillait chez M***, qui m'a expliqué
que les femmes ont ont entre vingt et trente «shapes» contrairement aux hommes qui n'ont que trois.
Çafaque... si une fille qui cherche une
paire de n'importe quoi, grandeur de deux à quatre ben, elle est mieux
de se pointer tôt pour être sûre d'en trouver une. Avant, forcément,
les ventes et les spéciaux en tous genres.
Raison de plus pour introduire et
rendre obligatoire le port du tchador au Québec sauf que ça va rendre ben
des enfants en Asie plus pauvres encore qu'ils le sont en ce moment. Et
pis comment jouer des fesses dans ces machins-là ?
À bien y penser, Monsieur Popp
devrait se compter chanceux avec ses livres en latin.
George
P.-S. : Et la
photo ci-dessus ? Monsieur Popp m'a dit qu'il en avait vu deux paires de
jeans semblables - et uniquement deux - en cinquante ans, mais qu'il
n'est sûr si la deuxième, il ne l'a pas vu en rêve.
*
065-2019-01-07
Père Noël, Père Noël...
Oui, je sais que ce n'est pas mon rôle ici de citer un
poème ou, dans le cas qui suit, les paroles d'une chanson, mais le 25 décembre, pour moi, est une journée particulière
au cours de laquelle je me rappelle toujous avec une certaine tristesse une chanson de Georges Brassens que Monsieur Pérec m'a autorisé à vous citer,
une chanson que j'ai cru être du Père Noël du temps où j'avais vingt
ans.
Le père Noël
et la petite fille
Avec sa hotte sur le dos
Il s'en venait d'Eldorado
Il avait une barbe blanche
Il avait nom "Papa Gâteau"
Il a mis du pain sur ta planche
Il a mis les mains sur tes hanches
Il t'a prom'née dans un landeau
En route pour la vie d'château
La belle vie dorée sur tranche
Il te l'offrit sur un plateau
Il a mis du grain dans ta grange
Il a mis les mains sur tes hanches
Toi qui n'avais rien sur le dos
Il t'a couverte de manteaux
Il t'a vêtue comme un dimanche
Tu n'auras pas froid de sitôt
Il a mis l'hermine à ta manche
Il a mis les mains sur tes hanches
Tous les camées, tous les émaux
Il les fit pendre à tes rameaux
Il fit rouler en avalanches
Perles et rubis dans tes sabots
Il a mis de l'or à ta branche
Il a mis les mains sur tes hanches
Tire la bell', tir' le rideau
Sur tes misères de tantôt
Et qu'au-dehors il pleuve, il vente
Le mauvais temps n'est plus ton lot
Le joli temps des coudées franches
On a mis les mains sur tes hanches |
Georges Brassens
(1921-1981) |
Attention : des copyrights peuvent être
attachés à ces paroles.
George
*
064-2018-12-03
Hier encore (air connu)
Je me disais qu'il me restait encore
du temps avant Noël, le Jour de l'An, l'anniversaire du p'tit et le 15
décembre, date où il fallait que je change les pneus de ma voiture
pour affronter l'hiver qui a débuté avant-hier.
Vous devinez le reste.
Et en plus, je me suis tapé une
grippe et j'ai fait une maille au dernier bas-culotte que j'avais la
journée - il y a trois jours - où je devais rencontrer le grand
patron.
Quant à l'argent, je n'ai pas reçu
encore les chèques de... et de... - Grève de la Poste...
Et ta chronique ? qu'on m'a dit.
Georges
***
063-2018-11-05
Boxers et virginité
Je ne suis pas née de la dernière
pluie, mais quand je compare le nombre de chums que mes amies
de fille ou mes collègues de travail ont connus - l'expression
est quoi déjà... bibliquement ? - j'ai l'impresssion d'être
une vierge qui s'ignore.
Autant l'avouer publiquement, je n'ai
eu dans ma vie que trois chums (du genre précité) et le
premier fut - excusez ma naïveté d'alors - mon ex. - Ça vous donne
une idée de mon expérience dans le domaine. (Comparativement à N***
qui travaille dans une autre section au bureau. - Un hint : «N»,
ce n'est pas une de ses véritables initiales. - Elle disait il y a
trois semaines qu'elle en avait déjà eu deux en même temps, mais qu'à
ce moment-là, elle avait déjà l'oeil sur un troisième...)
Je pensais à celui qui a suivi mon
deuxième en regardant mon courant s'habiller l'autre jour, en
sortant de la douche, et, malgré mon ignorance - quoique j'ai eu deux
frères - je n'ai pas pu m'empêcher de penser que tous les hommes se
ressemblaient... du moins au niveau vestimentaire.
Dieu a protégé mes innocents regards
et je le remercie de ne jamais fait voir des caleçons Speedo
ou du même genre, sauf en pubs. Tous les hommes que j'ai vu sans
pantalons, y compris les comédiens qui se sont déshabillés devant mon
ébahi regard (au cinéma ou à la télé), ont tous eu une caractéristique
et ça a été celle de porter des t-shirts et des boxers, ce qui me
fait dire qu'ils sont quand même décents dans la vraie vie , mais
qu'ils ont également quelque chose d'unique :
Je n'ai connu personne - et j'ai posé
la question à mes amies qui m'ont répondu qu'elles avaient toutes vécu
la même expérience - personne... enfin : pas un
homme, qui, un jour, a jeté l'un ou l'autre de ses sous-vêtements aux
poubelles car si je me fie à ce que je sais, les t-shirts d'homme et
leurs boxers connaissent tous la même fin : ils se désingrètent
graduellement jusqu'à disparaître complètement, la ceinture en latex
en premier.
J'imagine que dans un très loin
futur, quelqu'un fera une étude là-dessus et qu'éventuellement, en
appliquant le même principe, on n'aura plus besoin de ces boites qui
servent à faire la collecte de vieux vêtements pour les pauvres. Mais
alors, comment reconnaîtra-t-on un homme pauvre d'un pauvre homme dans
la rue ?
Voilà la question du jour.
Et après ça on dira que je ne suis
pas sérieuse.
Georges
***
062-2018-10-01
Des sous, des sous et encore des sous
(Chronique aurait dû paraître le mois dernier)
Ouais, c'était la rentrée (le mois dernier), cette
rentrée qui fait qu'avec l'éducation gratuite au Québec, ma fin de
mois a débuté le dix. Gratuite, l'éducation ? Faites-moi rire. - Avec
les cahiers, les binders, les plumes, les crayons à dessin, les
gommes à effacer, les sacs, les vêtements spéciaux (gym, chandails
divers, les bottes de ci ou ça - et je ne parle pas des patins ou des
planches à rouler) et j'en oublie tout autant, j'ai eu l'impression,
encore cette année de me faire avoir.
Et encore : y'a les passes pour ceci et cela,
les coûts des gyms, les excursions à prévoir, les lunchs, l'argent de
poche... Je me demande à chaque fois ce que ça sera quand il sera au
collège ou à l'université où il devra se loger ailleurs, voyager le
matin et le soir et, naturellement, se payer des distractions. -
Le père est là, oui, avec sa pension alimentaire (quelle
expression !) qu'il trouve aberrante sans savoir combien son fils coûte...
réellement.
Pas pour rien qu'on trouve tant d'étudiants qui
travaillent dans les restaurants et les bars où - et c'est ça qui est
le pire - ils gagnent plus d'argent qu'il leur en faut et qui, entraînés
par cet argent, décident de ne plus poursuivre leurs études ou de les
remettre à plus tard.
Et voilà que, par dessus le marché, mal orientés,
ils se lancent dans ce qu'ils croient aimer (l'art, la mode, le théâtre,
les sports mêmes) où les débouchés sont rares et les jobs encore
plus rares.
Pendant ce temps, au bureau et dans ceux de mes collègues
et amis, y'a une pénurie de main d'oeuvre. - Qui, de nos jours, veut
faire carrière dans l'assurence, la comptabilité, la vente au détail
? Ou dans une - quoi ? - manufacture ? - Eurk !
Si seulement je pouvais nourrir non pas quatre adultes
ou adolescents, mais deux adultes et un pré-ado avec $75 par semaine.
C'est pourtant ce que notre Premier Ministre actuel affirmait récemment...
Et ouis, de temps en temps, j'aimerais ça, moi boire
du vin ou me payer une serait-ce qu'une blouse signée.
Georges
***
061-2018-08-06
Les vacances de la construction
Mais oui, je comprends : mon père était plombeur. La première fois qu'il est resté à la maison à ne rien faire, c'est quand y'a eu la main brûlée par
un apprenti qui lui avait versé du plomb fondu au lieu d'à
l'intérieur d'un cercle de deux tuyaux de fonte où y'vait de l'étoupe
pour les réunir. - Les vieux plombeurs à l'écoute savent de quoi je parle.
Le reste du temps, il travaillait. Cinq jours et demi, puis cinq jours (seulement) par semaine. Quelques congés ici et là. Il est mort jeune. D'usure. Pas de vieillesse : d'usure.
Les vacances, c'étaient pour les riches. L'été, il trouvait ça o.k. la chaleur. mais l'hiver, sur des chantiers, c'était la misère.
Alors on a institué, de son vivant, les
deux semaines de vacances de la construction : les deux dernières de juillet.
Ça a eu comme effet d'arrêter le tiers de la population
dans leurs occupations normales parce que, figurez-vous, la construction,
ça implique ben du monde : les vendeurs de tapis, de gyproc, de
deux par quatre, de bouts de fils, de poignées de porte et même
les ceusses qui fabriquent ces machins qui servent à dérouler
le papier de toilette. Plus leurs conjoints ou conjointes.
Les prix de location de chalets, de chambres d'hôtels et même des
repas au restaurant ont augmenté en conséquence.
Moi, j'arrive du Maine. Deux heures à la frontière. La plus longue et la moins gardée du monde. À ce que les frères A. et C. Skonmadit.
Je suis épuisée et je recommence à
travailler demain (aujourd'hui quand vous lirez ceci).
Georges

***
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