Romans policiers
Une série de
ccommentaires de
Copernique
Marshall
(Pour une introduction à cette série, cliquez ICI.) |
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IV - Raymond Chandler
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Un rappel
Nous avons, jusqu'à présent, dans le cadre de
cette série de notes, parlé du «premier» roman policier (ou du
moins ce qui pourrait passer pour l'être), du «premier» et probablement
du plus connu détective-enquêteur de tous les temps et de là,
sommes passés aux romans policiers américains en voulant revenir
plus tard sur leurs équivalents français et britanniques, en
mentionnant qu'ils avaient, pour origine, les hard-boiled
detective novels et leur «premier» authentique et plus loyal
auteur. Dans l'ordre :
Aujourd'hui, nous parlerons du «successeur» de
Dashiell Hammett,
Raymond Chandler, avant de passer à son successeur et celui
a suivi ce successeur et qui est sans doute à l'origine de tous les
policiers-enquêteurs-détectives (amateurs ou professionnels), y
compris juges, avocats, etc. qui font maintenant partie de ce que
l'on connaît aujourd'hui sous le nom abrégé de «policiers» dans
le domaine de l'édition et surtout, nous le verrons plus tard, au
cinéma et à la télévision.
Avant d'en arriver là, nous ferons une pause en
parlant de traduction et peut-être de Films dits «Noirs».
Pour le moment, nous passons à :

Raymond Thornton Chandler
(1888-1959)
En bref :
Wikipedia résume la carrière littéraire de Chandler
comme suit :
«Raymond Chandler [fut] un écrivain américain, auteur des romans policiers ayant pour héros le détective privé Philip Marlowe. Son influence sur la littérature policière moderne, et tout particulièrement le roman noir, est aujourd'hui incontestable. Son style, alliant étude psychologique, critique sociale et ironie, a été largement adopté par plusieurs écrivains du genre.»
Les origines de Chandler, sa biographie, une liste de ses
oeuvres, les prix, distinctions qui lui ont été accordés et autres détails ont été résumés
dans la page qui suit :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Raymond_Chandler
Qu'on pourra comparer à celle publiée au même
endroit sur son prédécesseur, Dashiel Hammett :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dashiell_Hammett
On y remarquera deux détails :
-
Si Chandler est généralement reconnu pour
avoir créé, en 1939, le personnage de Philippe Marlowe, détective
privé, c'est à Hammett qu'on doit attribué le mérite d'en
avoir inventé le genre en celui de Sam Spade, en 1930.
-
Et alors que les premiers écrits de Chandler,
dans le monde des «policiers» datent de 1933 (avec la
publication dans la revue «Masks» de «Blackmailer's Dont
Shoot») - à 45 ans - et que son premier roman, «The Big Sleep»
date de 1939 - à 51 ans -, Hammett débute dans le monde des
«Hard-boiled Dedectives» en 1922 - à 28 ans -, son premier
roman, «Red Harvest» parut, quant à lui, en 1929, alors qu'il n'avait que
35 ans.
(On pourrait ajouter, ici, qu'à toutes fins
utiles, Hammett a cessé d'écrire vers 1935 - il n'avait alors
que 41 ans - alors qu'à cet âge, Chandler n'avait pas encore
commencé à publier autre chose que de courts essais et des poèmes.)
Ce ne sont là que des détails, mais je tiens à
les souligner pour insister sur le fait que si Chandler est reconnu
aujourd'hui comme faisait partie de ceux qui sont à l'origine d'un
type de romans bien spécifique, celui du policier américain, il
n'en a pas inventé le genre. Cet honneur revient à Hammett, mais
à Chandler revient celui - et l'on verra lors de mes prochains
commentaires - qui fut l'un, sinon le premier, à lui donner ce qui
lui manquait pour être considéré comme être un genre littéraire
à part entière.
Le style Chandler
Dire, comme l'auteur de la page WEB cité ci-dessus
est que Chandler allia, dans ses écrits, «étude psychologique, critique sociale et
ironie» est quelque peu exagéré.
Pour avoir lu tous ses romans (sauf le dernier),
plusieurs plus ou moins élaborés épisodes de sa vie écrits par
divers biographes qui semblent tous avoir voulu s'attacher un aspect
oarticulier de sa personnalité (son arrogance, son dédain de la
culture américaine (sic), son alcoolisme, sa dépendance à une de
ses compagnes, etc.), j'en suis arrivé à une conclusion :
Il n'existe pas un Raymond Chandler, mais plusieurs
:
-
un écrivain de short stories ou de
nouvelles souvent sans intérêt
-
un dialogiste extraordinaire (sa
collaboration, par exemple, au film «Double Indemnity» de
Billy Wilder en est la preuve)
-
un romancier digne d'être reconnu comme tel,
mais aux intrigues largement dépassées par plusieurs de ses
contemporains dont Erle Stanley Garner ou John Dickson Carr
-
un écrivain qui s'est cru, par ses
expressions inhabituelles et sa façon de décrire des situations,
aussi grand que les plus grands de son temps
mais également
-
le créateur d'un détective privé, Phillip
Marlowe qui, grâce au - quand même peu - grand nombre de ses
enquêtes a su attirer l'attention de producteurs et de réalisateur
de cinéma qui l'ont rendu célèbres par ses diverses
incarnations à l'écran, d'abord et surtout par Humphrey
Bogart, Dick Powell, Robert et George Montgomery, mais également
James Garner, Elliott Gould, James Caan et, à mon avis, un
des plus parfaits comédiens de Films Noirs: Robert
Mitchum (Farewell My Lovely, en 1975 et The Big
Sleep, en 1978).
À soustraire de ses caractéristiques, pour se
faire une idée plus précise de ce qu'il était, tout ce que vous
avez pu lire de lui en traduction car Chandler, dans ce domaine a été
vraiment mal traité. - Nous y reviendrons sûrement.
Quant à ses qualités de psychologue, de critiques
sociales ou de maître en ironie, je crois qu'il vaut mieux passer
ailleurs.
Mais qui mieux que lui pour nous décrire ce qu'il
était ?
Une mini-auto-biographie
C'en lisant sa correspondance que l'on trouve, rédigée
de sa main, une description de ce qu'il était.
Contexte
Peu satisfait de son éditeur américain,
Alfred A. Knopf , New York, qui, selon lui, ne publiait que des
romans sans envergures. Chandler décida, pour la publication de
ses prochains romans, de s'adresser en 1949 à Hamish Hamilton de
Londres.
Sur le point de publier son «The Long
Goodbye» le directeur d'Hamish Hamilton lui demanda
quelques notes autobiographiques.
C'est en réponse à cette demande
que Chandler lui écrivit la lettre que nous joignons en annexe :
Nous la joignons en deux versions :
originelle, anglaise et en traduction (tradaptation française).
Lettre de
Raymond Chandler
à
Hamish Hamilton
10 novembre 1950
Version anglaise
Version
française
Nous espérons que cela contribura à insérer
Chandler dans la liste de ceux qui ont fait l'histoire du roman
policier.
***
Un P.-S. :
Humphrey Bogart, 1.73 mètre, et Robert Mitchum,
1.85 mètre ,ont tous les deux jouer le rôle de Philip Marlowe dans
«The Big Sleep», le premier, sous la direction de Howard
Hawks en 1946, le deuxième, sous la direction de Michael Winner en
1978.
Le scénario de Howard Hawks diffèra énormément
du roman pour faire place aux scènes d'amour entre Bogart et
Bacall, mais, dans les deux films, une des premières scènes met en
présence Bogart et la jeune soeur du personnage jouée par Bacall.
Dans le roman, la scène se passe comme ceci :
La jeune soeur dit à Marlowe, un homme décrit par
Chandler comme un homme imposant :
«Tall, aren't ?» - («Vous êtes
grand, non ?»)
Et Marlowe de lui répondre :
«I didn't mean to be.» («Ce n'est
pas parce que je l'ai voulu.»)
Dans la version Mitchum-Winner, elle
se déroule telle quelle.
Dans la version Bogart-Hawks, le
dialogue a été modifiée comme suit :
«You're not very tall, are you ?»
(«Vous
n'êtes pas très grand, n'est-ce pas ?)
«Well I try to be.» («Je fais
de mon mieux»)
Détails, direz-vous, mais cette
version, la Bogart-Hawks, rmet en question la vraie nature du
Marlowe de Chandler et qu'il ne faut pas en conclure que Bogart en
fut le meilleur interprète.
Ce film, par ailleurs, a également
été tourné à une époque ou la censure, aux USA, était très
vigilente. Toutes références à l'homosexualité de deux
personnages décrits dans le roman de Chandler, à des relations
sexuelles hors mariage ont été pour aisnsi dire camouflées,
tandis que les évidentes photos de nues à l'origine du chantage
exercé sur un général à la retraite et qui fait appel à
Marlowe, en ont été bannies.
À noter cependant la scène entre
Bogart et la libraire Dorothy Malone, supprimée dans la version
Mitchum-Winner, une des plus sensuelles du film.
Prochain commentaire : Ross
Macdonald.
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